mardi 31 mai 2016

Quelques lectures de Mai

En ce dernier jours du mois de mai d'une pluviométrie absolument fol-dingue, voici un petit horizon de quelques lectures qui m'ont accompagné dans les trajets boulot-dodo notamment. L'art de la critique est difficile, je n'y suis pas à l'aise mais afin de me garder une trace de ce que j'ai lu, quand je l'ai lu, et ce que j'en ai pensé en deux mots à chaud, je vais tenter de tout centraliser ici. 

Les menteurs - Marc Lambron (Grasset)
Marc Lambron est un vrai Lyonnais. Je dis ça parce que je suis quant à moi un Lyonnais d'adoption (20 ans d'andouillette cette année; ce mois-ci même, ça se fête !). Mais Lambron est également un énarque qui faisait khâgne quand je venais au monde (ces deux aspects n'ayant strictement aucun lien comme on l'aura deviné) et plus récemment il a été élu à l'Académie Française. Bref, ça se pose là. Son roman "Les Menteurs" s'intéresse au destin de trois anciens camarades de khâgne au lycée du Parc de Lyon, (à deux pas de mon boulot alimentaire). Pas besoin d'être grand clerc pour piger qu'il y a pas mal d'autobiographie dans cette histoire. Marc Lambron s'intéresse donc à des quadragénaires qui se retrouvent et se souviennent, à tour de rôle, de ceux qu'ils étaient à vingt ans et de ceux qu'ils sont devenus. Une génération du rien qui n'a pu se bâtir ni sur la guerre ni sur la révolution et qui cherche un sens à sa vie. Bon. So what ? Lambron sait bien écrire, il a du vocabulaire... Il a fait khâgne, c'est pas rien. Il y a même quelques situations bien foutues, marrantes, grinçantes, et plutôt bien trouvées. Mais le dernier tiers du bouquin tourne un peu à vide, et s'enfonce dans un trou noir que l'on sent venir mais qui n'en demeure pas moins dommage. Quant aux personnages, ils ont une propension au mieux au stéréotype, au pire à l'ennui. C'est dur d'être un privilégié, y'a des coups de pied au cul qui se perdent, je t'enverrai tous ces gens serrer des boulons huit heures par jour pour réaliser qu'il y a des destins plus sombres que les leurs... 


La démence du boxeur - François Weyergans (Grasset)
Comme un dimanche pluvieux de grève des boulangers. Enfin, ça existe la grève des boulangers ? Je sais pas, pourquoi pas, après tout ? Les boulangers ont bien le droit de faire grève ! 
Un bouquin trouvé à 1 euro dans un vide grenier, Prix Renaudot 1992... Un début qui m'a intrigué pour le personnage principal, un producteur de cinéma nommé Melchior Marmont dont il est question et qui promet une belle introduction. On espère que l'histoire va partir dans des territoires un peu fous et puis non. Très vite un marécage dans lequel je me suis embourbé sans possibilité de retour. 
La question que je me pose : les grenouilles de Louisiane mangent-elles des miettes de pain ? A défaut d'autre chose, pourquoi pas, après tout ? 


Du côté de chez Swann - Marcel Proust (Folio)
Et maintenant, se tenant sur la gauche du ring, accusant 94 ans de suprématie littéraire sur le reste de la France, Proust, le petit Proust, Marcel de son prénom, qu'est ce qu'on n'a pas dit sur lui ?  
Alors oui c'est vrai, il y a des éclairs de génie, des phrases d'une beauté à couper le souffle, des ambiances vraiment réussies. Mais je l'avoue, je le confesse, j'ai été mis KO par le petit Marcel en 120 pages à peine. Incapable d'aller plus loin, parce que ce n'est pas mon truc. C'est un peu comme ces musiciens qui sont des virtuoses de leur instrument et qui vous plongent dans une admiration muette dès qu'ils envoient les premières notes de leur répertoire. C'est carré, c'est brillant, technique et enlevé, on ne peut qu'assister au spectacle la bouche ouverte d'admiration. Techniquement c'est magnifique mais on s'emmerde. Ben oui désolé Marcel, tu es vraiment un putain d'écrivain qui sait construire des phrases de fou furieux mais mon attention après 120 pages s'est fait la malle. Tu sais, je pense à un truc que disait Gabin dans "Un singe en hiver" : "(...) Mais tu m'emmerdes... Tu m'emmerdes gentiment, affectueusement, avec amour mais TU - M'EN - MERDES!" 


L'adversaire - Emmanuel Carrère (POL)
Emmanuel Carrère s'est depuis quelques années désintéressé de l'écriture de fiction. Il s'en explique de façon très claire au travers de plusieurs interviews qu'on peut écouter sur les vidéos qui abondent sur le net. 
Je ne connaissais Emmanuel Carrère que de nom, et ce sont ces vidéos qui m'ont donné envie de découvrir l'auteur. Comme quoi, il y a quelque chose d'utile dans les vidéos, celles que je regarde souvent après avoir corrigé ou écrit un chapitre, à la façon d'un sucre qu'on filerait à un clébard pour le récompenser après un tour réussi. Donne la patte, fais le beau, écris ton chapitre, réécris, corrige, enfin quoi, bouge toi le cul ! 
Cette histoire de "L'adversaire" est celle de Jean-Claude Romand, le faux médecin qui a tué pour de bon sa femme, ses parents, ses enfants, en point d'orgue à un tissu de mensonges dont il ne pouvait plus se sortir. Carrère a assisté au procès médiatique de cette actualité très médiatisé. Mais il sait faire la part des choses et raconte ce drame tout en retenue, exposant les faits tels qu'ils se sont déroulés (je pense) mais sans prendre partie. J'ai énormément aimé la façon dont Carrère raconte ce destin hors norme qui m'a secoué comme père tout d'abord, puis comme être humain (ou en tous cas qui essaye de le rester). Bon maintenant il va falloir que je découvre le Carrère romancier et puis le reste aussi.  

lundi 30 mai 2016

Dis papa, c'est encore loin ?

Me voilà donc reparti sur la route des corrections... Il s'agit d'une véritable école de la patience. Ce roman m'en fait voir des belles ! Le premier jet est terminé depuis le 5 mars 2016. Ah oui, c'est nouveau ça, désormais je note dans un fichier excel les dates des différentes étapes de tous mes projets. Ceci présente un double avantage : 
- Je planifie à l'avance et donc je me fixe des objectifs. 
- Je constate à posteriori les axes d'amélioration. Notamment les parties où je rame et où je dois être plus productif ! 

A titre d'information, voilà à quoi ressemble l'onglet du "réél/prévisionnel" : 

et l'onglet du second semestre.. un peu optimiste en prévoyant une V4 finale le 10 juillet, faut dire que j'ai envie de partir en congés en août avec ce roman terminé :) 

Pour l'instant tout ce sur quoi j'ai travaillé en 2016 concerne mon roman en cours. On voit notamment ici les dates phares : 
> Samedi 5 mars : fin du 1er jet (version 1)
> Jeudi 19 mai : fin du 2ème jet (version 2) : corrections de fond.
Depuis le 20 mai : réalisation du 3ème jet (version 3) : corrections de forme.

Comme on s'en rend compte, j'ai pas mal ramé entre le 5 mars et le 19 mai, c'est à dire entre le premier et le deuxième jet. Il faut dire que l'écriture du premier jet a été un long exercice très chaotique, j'y reviendrai plus tard... Et que du coup, la correction a été compliquée. 
Un peu plus de deux semaines passées à relire ce premier jet et à le saccager, armé de tout le matériel nécessaire. Au menu : des ratures et des notes dans tous les sens sur un tapuscrit où il ne restait au final plus grand chose. Il fallait trancher dans le vif, supprimer des chapitres inutiles, réarranger des scènes, prendre des notes pour revoir une chronologie, un personnage... rédiger des fiches d'étonnement, se mettre dans la peau d'un lecteur qui découvre l'histoire pour traquer les ficelles, les scènes trop molles... un boulot de titan. Et au final, un bon régime amaigrissant : 850 000 signes contre 1 050 000... (en sachant que le premier jet était en réalité un second jet car suivant une v0 qui était prévue pour dépasser allègrement les 1 500 000 signes!)

Inutile de dire que le 19 mai, j'étais plutôt content d'en avoir fini et surtout content d'avoir stabilisé la structure du récit, trente chapitres sur lesquels j'ai décidé de ne plus revenir pour me consacrer à la correction de la forme. Une semaine supplémentaire de boulot pour faire les corrections au feutre sur ce deuxième tapuscrit. C'est marrant je pensais que ça serait rien mais en réalité, il y a des modifications encore un peu partout...
Maintenant il faut reporter toutes ces modifications sur le traitement de texte. J'espère finir ce boulot vers le 7 juin. Ensuite, le troisième jet sera achevé et une grosse partie du boulot terminé. J'avoue j'en ai un peu assez, ce roman m'occupe depuis Septembre 2014 et j'ai vraiment été mauvais au démarrage, ce qui m'a fait perdre facilement 6 ou 9 mois de boulot. Mais qu'importe, on touche au but. Les bêta lecteurs auront bientôt ce troisième jet en mains et en juillet il sera temps d'apporter les derniers ajustements. Long is the road, comme dirait l'autre.

dimanche 29 mai 2016

La place des nuages

"All of us have a place in history. Mine is clouds" (Richard Brautigan).

Et je ne résiste pas au plaisir de copier/coller ce poème fantastique que l'on peut lire dans le recueil "Il pleut en amour" en VF :

Qu'est-ce que c'est agréable 
de pouvoir se lever le matin 
tout seul 
et de ne pas avoir à dire 
aux gens que vous les aimez
quand vous ne les aimez plus.

Brautigan par Dave McKean
Richard Brautigan fait partie, avec John Fante et Charles Bukowski des auteurs qui m'ont le plus marqué dans mes lectures d'adulte. Ceux pour lesquels j'ai cherché à chaque fois à lire toute l'oeuvre, de façon compulsive, sans méthode, sans ordre, simplement poussé par cette inextinguible envie de m'enivrer de leur monde et de leurs mots. 
On n'en a jamais fini avec Brautigan, son oeuvre est bouillonnante, poétique et dingue comme une cavalcade de mustangs sur la neige. Désolé, je ne suis pas Richard, je n'ai pas son talent de la métaphore décalée et romantique.
En attendant de corriger un recueil de chroniques et de textes courts pour lesquels je lui dois beaucoup (j'y reviendrai en temps et en heure), je n'ai pas pu résister au plaisir de glisser un clin d’œil au grand bonhomme dans l'un des chapitres du roman que je suis en train de terminer.
Bref, le troisième jet sera bientôt terminé et ce sera une bonne chose pour moi.
En attendant, pour en apprendre davantage sur Richard Brautigan, voici un site qu'il faut consulter : http://jimharrison.free.fr/RichardBrautigan.htm

jeudi 26 mai 2016

The thin line between love and hate

Janus boit du petit lait.
C'est un travail de longue haleine. Que je n'arrive pas toujours à concilier de manière efficace avec une activité professionnelle chargée dans les métiers des services informatiques. Mais on ne va pas se plaindre non plus, cette situation me semble être un très bon compromis entre la nécessité économique de nourrir une famille et la survie de l'individu équilibré que j'aspire à rester. 
Cela me fait penser à la chanson d'Iron Maiden intitulée "The thin line between love and hate": un titre qui résume bien les pensées qui peuvent assaillir l'auteur amateur qui pratique une sorte de grand écart permanent entre ses aspirations littéraires (un bien grand mot) et sa condition sanguine d'être de chair et d'impôts. 


Quand j'étais gamin j'écrivais. Quand au collège on nous a invité à réfléchir à une orientation professionnelle, seule l'écriture m'a semblé comme une piste raisonnable. Et puis je me suis perdu, pour tout un tas de raisons foireuses plus ou moins bonnes. Un jour je me souviendrai de tout cela et j'en parlerai. Mais l'écriture ne m'a jamais laissé tranquille pour autant et plus le temps passe, plus elle se fait insistante. 
Aujourd'hui je lui accorde le temps que je peux, conscient que seule la pratique régulière, quotidienne, m'apaise et me permet de progresser. 

Alors où j'en suis ?
En ce moment, je suis en train de relire et de corriger le deuxième jet de mon roman sans titre, ou plutôt répondant au nom de code "BM" (pour "Burning Man"...) Bientôt je ferai l'historique de ce bouquin, y'a des choses caustiques / marrantes / terribles (rayer la mention inutile) à en dire. En gros, depuis le mois d'avril, mes journées en semaine ressemblent à cela : 
- Réveil à 3h30. Réécriture de 3h40 à 5h10. 
- Corrections dans le train pour aller au boulot : 30 minutes entre 6h15 et 6h45.
- Travail alimentaire mais néanmoins sympathique de 7h10 à 16h40 avec 30 minutes de corrections pendant la pause déjeuner. 
- A nouveau 30 minutes de corrections dans le train pour rentrer de 17h00 à 17h30. 
- Et le soir, corrections supplémentaires entre 21h00 et 22h00 ou 22h30. 
Mis bout à bout, ce rythme permet d'allouer environ 4 heures par jour à l'écriture mais sur des tranches découpées, ce qui n'est jamais aussi efficace qu'une séance non stop. Encore une fois, on s'organise comme on peut... 
Quant au week-end, je me lève moins tôt mais j'ai plus de temps pour avancer, en général de bonnes séances de trois heures non stop le samedi et le dimanche. 
Ce rythme me permet de ménager un peu tout le monde, la famille, le travail, l'écriture, et mon équilibre mental.

Après m'être arrêté d'écrire des romans pendant près de 6 ans, j'ai repris le travail au long cours fin 2014 et je sens que cette pause m'a été bénéfique. Le temps que j'ai consacré à la pratique de l'ultra marathon m'a également beaucoup apporté dans mon activité d'auteur. J'en parlerai bientôt. En tous les cas je n'ai jamais passé autant de temps à retravailler, corriger un roman. Alors maintenant, que va t-il sortir de tout cela ? Un troisième jet présentable d'ici deux semaines aux béta-lecteurs. Il me tarde. Bientôt deux ans de travail irrégulier certes mais continu sur ce livre, j'ai bientôt fait le tour de la question et j'ai hâte de basculer sur un autre projet. Je sens que les personnages en ont fini avec moi ou moi avec eux, je ne sais pas très bien. En tous cas je ressens tout à fait ce que David Foenkinos disait récemment en réponse à la question "Quand savez vous qu'un livre est terminé" : quand les personnages n'ont plus besoin de moi, et qu'ils peuvent faire leur vie sans moi.