mardi 31 janvier 2017

Lecture : William Saroyan - Maman je t'adore

William Saroyan (1908-1981) est un auteur attachant qu'il faut s'empresser de lire et de relire en ces temps de pessimisme ambiant. Son œuvre est traversée par une vague de nostalgie optimiste qui célèbre les sentiments simples, les bonheurs quotidiens. Sans jamais verser dans le sentimentalisme outrancier et ces ambiances mollassonnes qui inondent les étagères des librairies des romans d'aujourd'hui. 
Je reviens toujours à Saroyan, comme à un pilier, une fondation, un repère. Chaque fois que je lis ou que je relis un livre de cet auteur, je me laisse emporter dans un tourbillon de bienveillance et de sérénité. A ce titre les extraordinaires "Papa tu es fou" ou "Folie dans la famille" ou encore "La comédie humaine" figurent au panthéon des titres de l'écrivain. 
Saroyan évoque l'enfance dans la plupart de ses ouvrages, et les temps difficiles des années 30 aux États-Unis. Ne comptez toutefois pas sur lui pour verser dans le larmoyant et le nombrilisme bobo - pas comme une certaine littérature dont les magazines bienpensants nous abreuvent de succès immérités. Saroyan a les pieds sur terre et aussi des convictions. Comme celle qui l'a poussé à refuser le prix Pulitzer pour ses talents de dramaturge. Mais il a laissé une partie de sa tête dans les méandres multicolores de son enfance. C'est sûrement pour cette raison que dans la plupart de ses romans, les enfants sont des personnages importants et très bien incarnés.

"Maman je t'adore" est un récit initiatique qui forme le pendant féminin de "Papa tu es fou", republié également chez Zulma tout récemment. L'histoire est celle d'une petite fille qui accompagne sa maman à la conquête de Broadway. On y découvre les coulisses de la scène mythique, les trafics en tous genres et les personnages hauts en couleur qui y défilent. Le tout à travers les yeux d'une petite fille de neuf ans qui vit seule avec sa mère mais qui a déjà toute la sagesse d'une jeune femme. 
Saroyan déploie dans ce roman des recettes identiques à celles élaborées dans "Papa tu es fou". Toutefois j'ai trouvé que l'ensemble manquait de liant et souffrait de moments de faiblesse auquel ce dernier titre avait échappé. Des longueurs qui m'ont un peu gêné alors que je m'attendais à retrouver le formidable feu d'artifice de "Papa tu es fou". Autre aspect qui m'a gêné mais qui n'est pas à mettre sur le compte de l'auteur : mon exemplaire Zulma souffrait d'un gros problème d'édition. La page 144 atteinte, j'ai eu la désagréable surprise de trouver en lieu et place de la page 145 la page 49 qui recommençait. Et de même pour les suivantes jusqu'à la page 96 avant de revenir à la page 193. Au final, un trou de 48 pages vraiment ennuyeux pour la lecture. A noter que j'ai signalé le problème aux éditions Zulma le 1er janvier et qu'à ce jour je n'ai toujours pas reçu de réponse.

Quatrième de couverture :
« Je pèse trente kilos et Mama Girl en pèse soixante. Elle a trente-trois ans, mais elle se fâche si je le dis. “J’ai vingt-deux ans, et tu le sais bien. – Si tu as vingt-deux ans, moi je ne suis pas encore née alors, puisque tu avais vingt-quatre ans à ma naissance. Tu me l’as dit toi-même. – Je mentais, répond Mama Girl, je n’ai pas voulu te dire que je t’avais eue à treize ans, c’est tout.” »

lundi 30 janvier 2017

MANX : Journal de bord - Semaines 19&20

Cet article fait partie de la série "MANX: Journal de bord" qui se propose de suivre de façon hebdomadaire l'écriture de mon nouveau roman depuis les premières prises de notes jusqu'à l'impression du livre dans... plusieurs mois :) Article précédent : Journal de bord (17&18)

Phase 7 - Le second jet : Semaines 3 et 4
Deux semaines supplémentaires viennent de s'écouler. Le rythme n'est pas aussi bon que je le voudrais mais ça s'améliore. J'ai pondu 50 nouvelles pages et surtout la structure du roman final est là. J'ai la sensation que les choses sont claires dans mon esprit sur là où je veux aller et que ce que j'écris depuis trois semaines correspond à cette direction. C'est tout l'intérêt d'avoir passé deux mois à écrire un premier jet en fin d'année 2016. Mais si je pouvais écrire davantage qu'une heure par jour, ça irait plus vite. Je pense avoir écrit environ la moitié du roman; ce ne sera pas un bouquin très épais.

Je ne suis pas à la lettre la structure que j'avais prévu de suivre mais cela me permet de laisser libre cours à plus d'improvisation. Le cadre n'est pas trop rigide et je peux adapter le ton et avoir un peu de latitude à l'intérieur d'un squelette défini. C'est à la fois rassurant et agréable. Je sais au début de chaque chapitre ce que je veux raconter et je m'y lance avec un filet minimal, quelques notes prises, des idées qui évoluent et des nouvelles qui apparaissent pendant l'écriture. 

Sinon, de nombreuses idées me viennent pour une autre histoire qui fera à priori l'objet d'un prochain roman, et je les note dans un carnet en prévision de cette future échéance. Les idées sont là, il me manque juste le temps pour écrire de façon plus assidue. C'est assez rageant, j'avoue. La tentation de trouver un travail moins chronophage est bien là mais pas sûr que le reste de la famille adhère au projet ! 

vendredi 27 janvier 2017

Un Guérif peut en cacher un autre

Décidément, aux éditions Gallmeister, on fait les choses bien. En plus de traduire et de publier de la littérature américaine hautement recommandable, on sait s'entourer.
François Guérif, le célèbre et brillant éditeur de chez Rivages Noir pour qui il a découvert des auteurs du calibre de James Ellroy (excusez du peu), déboule chez l'éditeur à la patte de loup. 
Son rôle consistera à apporter des projets. Gageons que nous aurons sous peu un catalogue encore plus enrichi de petites pépites à lire d'urgence. Il y rejoindra notamment un autre Guérif en la personne de son fils déjà dans la place en qualité de responsable de la (très bonne) collection Totem.

Un peu plus d'informations sur le site de l'express et des éditions Gallmeister.

mardi 24 janvier 2017

Lecture : Larry Brown - Père et fils

Suite de ma double lecture dos à dos de deux romans de Larry Brown. Après "Joe" dont j'ai parlé la semaine dernière, c'est au tour de "Père et fils".
Ecrit en 1996, soit cinq ans après "Joe", ce roman s'intéresse à nouveau à la vie de modestes êtres humains du Sud des Etats-Unis, vaguement désabusés, qui se débattent avec leurs pulsions, leurs idées de justice et d'amour, leurs histoires de famille et leurs quotidiens pour essayer de vivre. Thème ultra classique cher à nombre d'auteurs, américains en tête, mais pas toujours traité de façon équilibrée. 
Publié une première fois chez Gallimard en 1999, ce roman a été republié par Gallmeister dans la collection Totem en 2016.

J'ai beaucoup aimé ce bouquin d'un réalisme saisissant, collant comme la chaleur du Mississippi, sec et aride comme la poussière du sud. 
Psychologique, introspectif, ce récit est prenant, joue sur le clair-obscur et s'attache à des personnages en marge qui composent avec la violence naturelle de leur condition.
Le Glen de ce récit est un authentique salopard superbement mis en mots par un Larry Brown inspiré. Quant à ses relations avec celle qu'il prétend aimer et avec son père, l'étude de moeurs à laquelle nous convie l'auteur ne manque pas d'intérêt. Alors oui ce n'est pas lumineux, ce n'est pas exempt de quelques longueurs et ce n'est pas pour les acharnés de l'action permanente. Mais il y a cette voix particulière, le chant lancinant de l'auteur qu'on entend tout au long de ces plus de 400 pages et qui font voyager le lecteur dans les champs de coton, sur le chemin de la rédemption et de la folie humaine. 

Quatrième de couverture« Après trois ans derrière les barreaux, Glen sort tout juste de prison. Il rentre chez lui, dans ce Sud écrasé par la chaleur où son père, son frère, sa petite amie et le fils qu’elle a eu de lui, l’attendent. Quarante-huit heures plus tard, Glen a déjà commis un double meurtre. Aucun indice ne peut mener jusqu’à lui. Mais tout va conduire à faire rejaillir à la surface les secrets enfouis depuis deux générations, les démons qui hantent les âmes en peine de cette famille aux prises avec son destin. »

Père et fils Traduction de Pierre Ferragut - Editions Gallmeister, collection Totem, 416 pages, 11 €

vendredi 20 janvier 2017

Lecture : Larry Brown - Joe

Le talent de Larry Brown ne s’est pas exprimé longtemps. Cet auteur américain originaire du Mississippi a publié cinq romans et deux recueils de nouvelles entre 1988 et 2003 avant de décéder d’une crise cardiaque en 2004 alors qu’il n’avait que 53 ans. L’intégralité de son œuvre a été traduite en français chez Gallimard dans la collection "La noire" puis en poche dans la collection "Folio Policier". Même si c’est anecdotique, force est de constater que la classification française et cette habitude poussiéreuse de tout cataloguer sous des étiquettes ne fait pas bon ménage avec la liberté de ton et de style de la littérature, américaine de surcroit. Mais rien de nouveau sous le soleil, il s’agit là d’une rengaine bien connue. D’ailleurs, et pour finir sur le sujet, il est amusant de constater que dans certaines librairies les livres des éditions Gallmeister sont classées sous le thème « Nature Writing » où cela ne se justifie pas toujours.

Mais qu’importe, louons cette initiative des libraires qui permet de regrouper les titres de cette maison de qualité que sont les éditions Gallmeister qui republient –entre autres- l’œuvre de Larry Brown. J’ai profité de quelques jours de congés à noël pour lire d’affilée deux de ses romans dans cette collection « Totem » que j’affectionne pour plusieurs raisons (format, maquette, papier et bien sûr le plus important, la qualité et l’homogénéité des textes). Voici un petit avis sur le premier d’entre eux, "Joe" écrit en 1991.
Ce bouquin est sûrement celui qui a fait le plus connaître son auteur, puisqu’il a bénéficié d’une adaptation (plutôt bonne) au cinéma, du même titre, réalisé par David Gordon Green avec un très bon Nicolas Cage dans le rôle de Joe, le personnage principal. Un personnage qui est l’archétype de l’anti-héros, buveur, violent, mais qui a un sens appuyé de la justice et de la liberté individuelle. Un homme aux réactions spontanées et au passé agité dans lequel il essaye de ne pas replonger. Certains individus semblent toutefois avoir un destin auquel ils ne peuvent pas échapper. Voilà, en résumé, le petit grain qui fait tout l’intérêt de ce bouquin. Et aussi le personnage de Gary dont la vie va basculer au contact de Joe. Ce roman s’intéresse aux personnages marginaux, ceux qui semblent condamner à patauger dans les difficultés et qu’une malédiction rejette tout en bas lorsqu’ils parviennent à s’élever. L’écriture est à l’image de ces caractères forts et introvertis : brûlante et sans fioriture. On se sent immergé dans le récit, capté par les images d’un sud des Etats-Unis rural et violent, austère et brut. Le tout dans une écriture qui ensorcelle. Un très chouette bouquin, noir, oui, sûrement.

Quatrième de couverture : « Gary Jones a peut-être bien quinze ans. Sa famille vagabonde, arpente les rues et les bois du Mississippi tandis qu'il rêve d'échapper à cette vie, à l'emprise de son bon à rien d'ivrogne de père. Joe Ransom a la quarantaine bien sonnée. Il ne dénombre plus les bouteilles éclusées et les rixes déclenchées. Lorsqu'il croise le chemin de Gary, sauver le jeune garçon devient pour Joe l'occasion d'expier ses péchés et de compter enfin pour quelqu'un. Ensemble, ils vont avancer et tracer à deux un cours sinueux, qui pourrait bien mener au désastre… ou à la rédemption. »

Extrait : « On peut pas vivre vingt ans avec quelqu’un sans le connaître, comme moi je la connais. Elle va tout le temps à l’église et moi jamais. Elle aime pas être avec des gens qui boivent, elle aime même pas sentir l’odeur de l’alcool. Moi je bois, et j’aime ça. C’est tout. Si t’es obligé de te disputer avec quelqu’un jour après jour, tu finis par en avoir marre de vivre avec lui. Et ça change rien si tu l’aimes. »

Joe Traduction de Lili Sztajn - Editions Gallmeister, collection Totem, 336 pages, 10 €

mardi 17 janvier 2017

MANX : Journal de bord - Semaines 17&18

Cet article fait partie de la série "MANX: Journal de bord" qui se propose de suivre de façon hebdomadaire l'écriture de mon nouveau roman depuis les premières prises de notes jusqu'à l'impression du livre dans... plusieurs mois :) Article précédent : Journal de bord (15&16)


Phase 7 - Le second jet : Semaines 1 et 2
Alors voilà deux semaines que j'ai attaqué l'écriture du second jet du projet "Manx". Je jongle entre première version manuscrite en octobre et novembre que je garde à distance et plan de cette "v2" griffonné en décembre.
Dans l'idée, je réécris tout en ayant en tête ce qui n'a pas fonctionné dans le premier jet et surtout en essayant de me rapprocher des nouvelles idées et pistes qui ont jailli pendant l'écriture de ce premier jet, véritable brouillon d'écriture.
Maintenant, je n'écris plus du tout à la main, il faut y aller pour de bon, cette deuxième version va ressembler pas mal au roman final (enfin si tout se passe bien...) 
Donc en pratique, je tape dès que je peux. Je jongle entre l'iMac et le MacBook pour écrire sur un grand écran quand c'est possible et sur un petit (mais costaud) écran dans le train pour aller bosser, le soir dans mon lit et chaque fois que j'ai besoin de m'isoler pour avancer. Ce qui arrive quand même très souvent - la plupart du temps en fait puisque la famille squatte régulièrement l'iMac.

"Dis papa, c'est encore loin ?"
Les chiffres sont les suivants après pile poil 15 jours : 9 scènes écrites soit très exactement 99 567 signes et à peu près 39 pages d'un format A5 tel qu'utilisé pour la publication. Ce n'est pas énorme mais ça avance de façon régulière, ce qui est l'essentiel.
L'idée sur la deuxième quinzaine de ce mois de janvier va donc être de continuer sur un rythme constant, je ne me fixe pas vraiment d'objectifs quantitatifs. Je sais que cela peut être bien, et que j'en aurais sûrement besoin compte tenu du peu de temps dont je dispose pour écrire de façon efficace mais l'écriture doit rester un plaisir. Enfin, je durcirai peut être le ton à la fin du mois si je vois que je n'avance pas assez vite... En attendant, les outils de travail à disposition sont agréables, je revis depuis que j'ai abandonné Word pour passer entièrement sur Scrivener.

En attendant une présentation plus poussée de ce logiciel d'écriture absolument prodigieux, voici une petite capture d'écran du carnet de bord du projet "Manx" sur Scrivener en date du 15 janvier : 

Sur la partie gauche, trois blocs importants dans l'ordre de haut en bas :
- les scènes écrites
- les fiches de personnages
- le plan macro

Dans deux semaines, je ferai de nouvelles copies d'écran pour montrer comment la philosophie et la puissance de Scrivener en fait un véritable studio d'écriture qui dépasse de très loin tout ce qu'un logiciel de traitement de texte classique peut offrir.

jeudi 12 janvier 2017

Sorties Gallmeister de Janvier

Il va falloir vous y faire. Les éditions Gallmeister c'est mon dada. Je tiens à préciser tout de suite que je touche rien sur les ventes, et que je n'ai aucun contact avec cette maison pour être édité. Mais bon sang, voilà un éditeur qui nous propose des romans américains avec une voix, une tonalité, un univers auquel j'accroche à chaque fois. 
Je vous dois une double chronique de deux romans de Larry Brown (non, pas le basketteur) un des écrivains le plus doués de la seconde moitié du XXème siècle mais qui est hélas disparu trop tôt (1951-2004). Faut juste que je prenne le temps de la soigner cette double chronique parce que nom de zeus, ces deux romans-là étaient vraiment excellents. 
En attendant, je signale la sortie des nouveautés Gallmeister de Janvier, en particulier dans la collection Totem qui reste ma préférée, lisant énormément dans le train pour aller bosser, ce format "poche" est excellent. Le Larry Brown est sur ma pile de lectures, je vous en dirai plus bientôt.
 
 Fay de Larry Brown.

4ème de Couverture : 
À dix-sept ans à peine, Fay fuit une vie de misère. Elle s’élance sur les routes du Mississippi pour gagner la mer et un autre avenir. Elle n’a pas mis les pieds à l’école depuis longtemps, ignore beaucoup des règles de la vie en société et ne sait pas vraiment ce que les hommes attendent des femmes. Belle, lumineuse et parfois inconsciente, elle trace sa destinée au hasard de ses rencontres, s’abandonnant aussi facilement qu’elle prend la fuite. Mais cette femme-enfant qui ne réalise qu’à demi l’emprise qu’elle exerce sur ceux qui croisent son chemin, laissa dans son sillage une traînée de cendre et de sang.
 Pike de Benjamin Whitmer. 

4ème de couverture :  
Douglas Pike n’est plus le truand d’autrefois. De retour dans sa ville natale des Appalaches proche de Cincinnati, il vit de petits boulots et tente de combattre ses démons du mieux qu’il peut. Jusqu'au jour où il apprend que sa fille, depuis longtemps perdue de vue, vient de mourir d’une overdose. Et où il découvre par la même occasion l'existence de sa petite-fille âgée de douze ans. Tandis que la gamine et lui tentent de s’apprivoiser, un flic brutal et véreux commence à manifester un intérêt malsain pour la fillette.


mercredi 11 janvier 2017

Tintin en couleur

Alors qu'à l'occasion du remplacement d'un faux démocrate par un vrai républicain à la maison blanche, certains annoncent un réchauffement des relations diplomatiques entre les deux plus grandes puissances tyranniques de notre histoire récente (USA vs Russie), le Tintin chez les Soviets met de la couleur. Coup de pub... ou coup de pub ?


Publication initiale de 300 000 albums chez Casterman : pas la peine de vous précipiter dessus en espérant une flambée des prix dans cinquante ans, ça ne vaudra pas tripette. 

mardi 10 janvier 2017

Lecture : David Vann - Impurs

J'ai déjà dit sur ces pages (ici et ) tout le bien que je pensais des romans de David Vann. Il y a chez cet auteur une désespérance du quotidien qu'il sait rendre palpable même dans les silences les plus inoffensifs de ses personnages. 
Troisième roman écrit par l'auteur originaire d'Alaska, "Impurs" nous emmène une nouvelle fois sur les traces d'une famille où se cachent les crises les plus violentes et les fissures psychologiques les plus profondes.

Le personnage principal de cette histoire, Galen, est un adolescent sur le point de basculer dans l'âge adulte qui vit seul avec sa mère. Les rapports qu'il entretient avec celle-ci n'ont rien de très sain... mais ce n'est rien en comparaison de ce qui les attend par la suite. Sans même parler des relations qu'il entretient avec les autres femmes de la famille. Car c'est à une réunion familiale que nous assistons lorsque la mère, la grand mère, la tante et la cousine de Galen vont passer un week-end dans la propriété secondaire perdue dans la campagne. L'occasion pour cette famille fracturée de se confronter aux non-dits, aux aigreurs et aux rancœurs qui subsistent dans les faux-plafonds de leurs vies. On pourrait facilement sous-titrer ce roman avec la célèbre tirade "Famille, je vous hais". Huis clos psychologique qui va crescendo, Impurs nous entraine donc sur les terrains d'une noirceur où la famille joue le rôle du méchant. On sent David Vann à l'aise avec son propos, dans un contexte qu'il apprécie et qu'il avait déjà brillamment mis en œuvre à l'occasion de l'excellent "Sukkwand Island".
Ici pourtant, après une première partie menée sur un tempo enlevé au cours de laquelle l'auteur plante les graines de son intrigue avec efficacité, la seconde partie du livre tire en longueur et offre une opposition parfois maladroite entre les deux protagonistes principaux. Avec une tendance à faire de ses personnages des blocs manquant de subtilité dans leurs réactions et leurs dialogues. De légers écueils qui font de ce livre un titre moins réussi que les précédents écrits par l'auteur mais qu'on ne s'y trompe pas, "Impurs" reste néanmoins un roman envoûtant, qui met mal à l'aise et qui fait voyager très loin dans la folie. 

"Impurs", publié chez Gallmeister, traduit par Laura Derajinski est disponible en deux formats : 
- grand format (collection NATURE WRITING): 288 pages, 23 EUROS
- poche (collection TOTEM) :  256 pages, 10.5 EUROS

dimanche 8 janvier 2017

Lecture : Samuel W Gailey - Deep Winter

Avec "Deep Winter" il n'y a pas tromperie sur la marchandise : propos noir, décor noir, personnages noirs, et maquette noire.
Le pitch a des airs de déjà vu : dans un patelin campagnard perdu de Pennsylvanie, l'idiot du village est accusé du meurtre de Mindy, la serveuse du dinner. Mais lui connait la vérité : alors qu'il se rendait chez Mindy il est tombé nez à nez avec le tueur : l'adjoint du shérif lui-même. La chasse à l'homme peut démarrer. 
Traduit par Laura Derajinski pour le compte des éditions Gallmeister, ce bouquin fait partie de ces livres qu'on ne ne peut reposer avant d'être allé au bout, impatient de savoir comment tout cela va se terminer. Car on sent que l'inéluctable se rapproche à chaque page, la tension montant sans cesse pour s'achever dans un déluge de noirceur. Producteur et scénariste, Samuel W Gailey livre ici un premier roman fort prometteur pour la suite de sa carrière d'écrivain. S'il n'y fait pas montre d'un style flamboyant ni d'une construction narrative révolutionnaire, c'est drôlement efficace. Et son expérience de scénariste n'est sûrement pas étrangère à cette immersion. 
Il faut malgré tout nuancer le propos en relevant certaines ficelles et des airs de déjà-vu qui combinés à des personnages un peu clichés (le méchant shériff adjoint, mais qu'est ce qu'il es méchant ! et l'idiot du village, qu'est ce qu'il est innocent et gentil...) ne parviennent pas à placer ce livre au-dessus de la mêlée des romans noirs du même genre. Malgré tout, l'efficacité est bien au rendez-vous et le lecteur est capté. C'est déjà pas mal après tout.

jeudi 5 janvier 2017

Lecture : Jim Harrison - Julip

Allez savoir pourquoi, en ce moment, je n'accroche pas au format de la nouvelle. Je suis passé à côté de "L'homme qui apprenait lentement" de Pynchon, j'ai moyennement apprécié "Goodbye Columbus" de Roth. Je ne m'explique pas ce constat. Je suppose que c'est simplement un concours de circonstances car en d'autres lieux, en d'autres temps, j'ai été client des recueils de nouvelles.
Jim Harrison s'est fait connaître en France avec un recueil de nouvelles adapté plus tard au cinéma, "Légendes d'automne" écrit en 1979. Ensuite, il n'a plus  cessé d'écrire ce genre de récits en les intercalant entre deux romans et allant jusqu'à produire sept autres recueils de nouvelles entre 1990 et 2014.

"Julip" a été publié aux USA en 1994 et l'année suivante en France dans une traduction de Brice Matthieussent, le traducteur attitré de Big Jim dans l'hexagone depuis 1991. Il s'agit d'un recueil de 3 nouvelles : "Julip" qui a donné son titre au recueil, suivi de "Chien Brun" et "Le dolorosa beige".
"Julip" est sans conteste la nouvelle du recueil que j'ai préféré. Les aventures de cette jeune femme délurée pleine de vie, de fesses, de joie et d'absolu comme on imagine que l'auteur aimait les femmes. Son aventure un peu paumée avec deux hommes mûrs m'a rappelé le décor de "Un bon jour pour mourir" du même auteur lu récemment mais en plus réussi.  
"Chien Brun" réutilise un héros récurrent de l'univers de Harrison et ravira les nombreux amateurs du personnage. Un (anti) héros réussi même si ce n'est pas ce que je préfère de l'auteur. 
J'avoue que j'ai lu en diagonale "Le dolorosa beige" car je n'ai jamais réussi à entrer dans cette histoire de dépression de professeur d'université. 
Enfin notons l'immonde couverture de cette édition 10/18 qui date certes de vingt ans mais qui n'en demeure pas moins absolument dégueulasse. 

mardi 3 janvier 2017

Rétroviseur Lectures 2016

L'année 2016 aura été riche en découvertes. Je me serais occupé avec 67 lectures cette année, et alors que je pensais pouvoir affirmer sans l'ombre d'un doute ne pas lire beaucoup de livres d'auteurs francophones, une lecture plus attentive de ces chiffres m'a prouvé le contraire : 
- 34 livres d'auteurs francophones
- 26 livres d'auteurs américains
- 7 livres d'auteurs d'autres horizons

Les auteurs les plus lus étant : 
- Jim Harrison (5 livres)
- Jean Echenoz et Dany Laferrière (4 livres chacun)
- Dan Fante et David Vann (3 livres chacun)

Je me pose toujours la question sur la coexistence de deux êtres à l'intérieur de la même personne : celui qui lit et celui qui écrit. Les deux sont intimement liés, comme les deux facettes d'une personnalité complexe et multiple. Je reste convaincu que la somme des deux vaut plus que la simple addition arithmétique de deux unités. Lire sans écrire, ou écrire sans lire, c'est l'assurance de passer à côté de la complétude. 
Maintenant que je dois écrire le deuxième jet de "Manx", je me demande malgré tout s'il ne convient pas de nuancer en éloignant un moment toute lecture de fiction, pour ne pas être influencé et pour laisser celui qui écrit libre de tout parasitage en provenance de celui qui lit. Au bénéfice de lectures d'ouvrages de non fiction qui abondent et qui, de plus, permettent de s'immerger dans de nouveaux univers. 
Et par exemple, commencer à se documenter pour les futures échéances d'écriture me semble un bon point d'attaque. Justement pour toutes ces raisons. 

lundi 2 janvier 2017

MANX : Journal de bord - Semaines 15&16

Cet article fait partie de la série "MANX: Journal de bord" qui se propose de suivre de façon hebdomadaire l'écriture de mon nouveau roman depuis les premières prises de notes jusqu'à l'impression du livre dans... plusieurs mois :) Article précédent : Journal de bord (13)


Phase 7 - Le second jet ! 
Deux semaines sont passées depuis le dernier point sur l'écriture de ce nouveau roman. Voilà maintenant seize semaines que j'ai commencé à réfléchir à ce projet et déjà six semaines que j'en ai achevé le premier jet. J'ai ensuite relu celui-ci, y ai trouvé pas mal de sujets de fond à revoir et décidé de réécrire complètement un deuxième jet. Mais auparavant il était nécessaire de se mettre au clair sur les objectifs de cette nouvelle version. 
Alors ces deux dernières semaines, j'ai travaillé en ce sens, pas de manière forcenée certes mais suffisamment pour être à peu près clair sur là où je souhaite aller sur ce deuxième jet. J'ai ainsi posé une trame de seize "chapitres" qui donneront lieu à un certain nombre de scènes. Celles-ci ne sont pas figées, je les écrirai au fil de l'eau selon l'envie et l'inspiration du moment. Cela correspond à ce que je souhaitais faire de façon un peu différente du premier jet, en ne prévoyant pas tout à l'avance. Je crois qu'il faut laisser la chance à ses personnages de nous étonner en choisissant eux-mêmes une partie de leur destin. 
Autre sujet qui m'obsédait un peu : le point de vue narratif, sujet sensible sur lequel je n'arrivais pas à trancher en faveur d'un choix plutôt que d'un autre et ce depuis le début ou presque du projet. Désormais je suis clair sur ce point, ayant trouvé je pense le ton juste et la distanciation adéquate pour que chaque personnage puisse s'exprimer de façon équilibrée dans le respect de ses caractéristiques propres. Et surtout je suis convaincu que cela va fonctionner, condition indispensable pour prendre du plaisir en écrivant. 
J'ai également affiné les caractères des deux personnages principaux du récit, trouvant qu'ils manquaient d'épaisseur dans le premier jet. Quelques touches légères pour les ancrer davantage dans la réalité de la fiction, un historique plus creusé et qui ne demande qu'à l'être davantage au cours du deuxième jet. J'espère trouver le dosage adéquat : seule l'écriture me le dira. Car maintenant, assez procrastiné, il est temps de se mettre sérieusement au travail. Après avoir hésité à écrire ce deuxième jet à la main - comme je le fais de façon systématique pour un premier jet - j'ai décidé d'écrire directement à l'ordinateur ce deuxième jet. Et pour avoir la souplesse qu'il me manquait, j'ai investi dans une nouvelle "machine à écrire", un MacBook Pro 2015 qui devrait seconder de manière efficace mon vieillissant iMac 2009. J'en ai profité pour mettre à jour la version de Scrivener, le logiciel que j'utilise pour écrire sur ces petites bestioles. Ce n'est certes pas l'outil qui fait la qualité de ce que l'on produit mais prendre plaisir à travailler sur un environnement confortable, c'est un luxe que j'apprécie. 
Voilà, c'est donc parti pour quelques mois d'écriture. La première scène de ce deuxième jet a été écrite le 31 décembre, j'espère terminer cette nouvelle version au printemps, sans plus de précisions pour l'instant mais il va falloir que je sois régulier et éviter au maximum les journées à 0 mot comme ça a été le cas en ce 1er janvier. L'écriture d'un roman c'est comme la préparation pour un ultra-marathon : sans régularité, on n'arrive à rien.