samedi 29 décembre 2018

L'extrait du... 29 Décembre

L'extrait du jour est le début du roman PIKE de Benjamin Whitmer, sur ma liste de prochaines lectures.

"Il n’est pas difficile d’identifier Dana. Elle entre par la porte, le pelvis graisseux en avant, vêtue d’un manteau rose qui semble être passé sous un camion poubelle. Une fillette sale aux cheveux noirs fait la moue derrière elle, douze ou treize ans, sweat-shirt déchiré un rien trop fin pour la saison. Les yeux de Dana se posent sur Pike comme si elle le connais- sait, elle s’approche de lui en traînant les pieds, pousse la fillette dans le box, puis s’y glisse elle-même en baissant la tête comme si elle craignait qu’on ne la voie. Il serait étonnant que quelqu’un l’eût manquée. Le restaurant est plein de mineurs de l’équipe du matin, qui sirotent leur café, feuil- lettent le journal, saluent la compagnie en sortant, en entrant, le dos encore courbé par le froid du dehors, et tous gardent un demi-œil vers elle depuis qu’elle a poussé la porte. Nanticote est une petite ville.
— Vous êtes pas tout à fait aussi grand que j’croyais, dit- elle.
Pike ne relève pas.
— Comment est-elle morte ?
— Donnez une pièce à Wendy, dit Dana. J’ai vu un distributeur de journaux en arrivant. Elle aime bien lire.
Pike sort vingt-cinq cents de sa poche. La fillette prend la pièce et s’éloigne en bousculant Dana. Elle a un chaton gris et blanc dans les bras. Il bâille et sa langue rose lape la graisse de l’atmosphère comme s’il avait voulu attraper des flocons de neige, les canines luisantes comme des lamelles de glace.
— Comment est-elle morte ? répète Pike.
Dana renifle, essuie un long flot de morve d’un revers de manche rose.
— Elle a fait une overdose. Héroïne.
Rien de surprenant. Mais Pike loupe le cendrier en tapo- tant sa cigarette d’un peu haut. Des brins de tabac rougeoyant s’élèvent en volutes dans l’air graisseux puis se posent en fré- missant sur la pilosité noire et drue de son avant-bras. Il les remarque à peine.
— Quand ça?
— La semaine dernière.
Dana tend le bras au-dessus de la table, lui prend une de
ses Pall Mall sans filtre et l’allume avec le briquet qu’il a posé à côté.
Wendy revient, un journal mal plié serré sous le bras droit. Pike fait un signe de la tête à l’intention d’Iris, la serveuse. Elle se fraye un passage jusqu’à leur table, qu’elle atteint en même temps que Wendy.
— Emmène-la au bar et sers-lui des pancakes aux myr- tilles, dit Pike. (Il se tourne vers Dana.) Tu veux quelque chose ?
— Un café, je dirais pas non, répond-elle.
— Allez, viens, ma puce, dit Iris en posant une main sur l’épaule de Wendy et en l’entraînant vers le bar."

vendredi 28 décembre 2018

Lecture : Gilles Leroy - Alabama Song

Avec Alabama Song, Gilles Leroy a remporté le Prix Goncourt 2007, année mémorable puisque il s'agit de l'année de naissance de ma fille...
Ce court roman (moins de 200 pages) paru au Mercure de France est une biographie fictive de Zelda Fitzgerald, fille de juge d'Alabama devenue égérie de Francis Scott Fitzgerald et l'autre face du couple mythique qu'ils formèrent dans les années folles. Un destin hors du commun, profondément romanesque, qui ne pouvait laisser indifférent un romancier passionné de littérature américaine tel que Leroy. 

La notion de biographie fictive c'est... épatant, comme dirait d'Ormesson. Du moment que c'est fictif, on peut mélanger la réalité historique avec des bouts de réalités tierces, éparses. Et aboutir à quelque chose d'autre, une sorte de mutation du réel qui a peut être quelque chose à voir avec les propres démons de l'auteur, ses envies, ses rêves... J'avoue que l'exercice présente un caractère excitant pour un auteur; c'est un terrain de nouvelles expérimentations d'apparence très riche.

Pour en revenir à Alabama Song, Leroy va même plus loin que la biographie puisqu'il s'immisce dans la peau et dans le personnage de Zelda. Il le fait d'ailleurs avec un talent certain, tout en subtilités et en finesse. Zelda est, comme on pouvait s'y attendre, présentée comme un être fragile et peu ménagé par les secousses de la vie. Un être trop souvent réduite à "femme de", un état qui la bride mais dont elle ne peut se résoudre à échapper. Un destin romanesque dans une époque de mille fantasmes. Avec une écriture à la fois classieuse et efficace, Leroy signe un bouquin bien foutu, agréable et qui invite à la rêverie. 

Extrait
"Hier, la nuit, nous avons tellement ri et dîné de si bonne humeur, la compagnie était merveilleuse et il fallut danser... Hélas, dans mes chaussons de satin, ça saigne et s'écrabouille. Mon destin fait des siennes, et le maigre espoir se fait nouille. Certains disent que je l'ai cherchée, que j'ai voulu et fomenté ma déchéance. Les imbéciles! Je me souviens des nuits au camp Sheridan, où je dansais jusqu'à ne plus sentir sous mes pieds que la brûlure du cuir frotté au parquet de la piste. J'ôtais mes escarpins et je continuais pieds nus. Les aviateurs applaudissaient, et les mécanos, et les radios, et les aiguilleurs. Mes jupes tourbillonnaient, et, d'un doigt brandi ou d'une grimace de la bouche, je reproduisais des signes de garçons que je ne comprenais pas. J'étais la jeune putain, la petite salope bourgeoise de Montgomery, la miss Alabama des casernes et des prisons. Et je n'en savais rien. Qui condamnera ? Qui dira qu'on est pas bien dans les bras d'un homme, entre ces bras enveloppants d'un garçon si doux, si sérieux, qui part à cette absurdité de guerre ? On voudrait tant les chasser, ceux qui gênent, toutes ces gueules cassées qu'on croise dans les métros et les coupe-gorge de Paris, toutes ces gueules illisibles sous les coutures et les raccords plastiques. Leur difformité physique est le reflet de notre monstruosité morale."

jeudi 27 décembre 2018

L'extrait du... 27 décembre


"Dans l’urgence du prurit et l’ignorance de toute hygiène contraceptive, les filles se retrouvent grosses d’une marmaille à tétine, une progéniture de géniteurs précoces. Des pères maigres aux yeux floutés d’une candeur victime font faire l’avion à des bébés gras aux cris de porcelets. Beaucoup de meurtres d’enfants mais beaucoup de naissances aussi, plein de familles nombreuses à nourrir de torgnoles et de frites. Une enfance à torcher, des bébés à changer, une jeunesse à rincer."

Hervé Prudon - La langue chienne (La petite vermillon)

mardi 25 décembre 2018

L'état de l'Artaud en 2018

Antonin Artaud va passer dans le domaine public dans une semaine et tout le monde s'en fout. Même le ministère de la culture n'en a rien à foutre. C'est dire l'état de déliquescence de cet organe souvent aussi mou et peu impliqué que la bite d'un centenaire devant une rediffusion de "Thé Dansant". 

Rappelons pourtant - et à toutes fins utiles pour les ramollis du bulbe qui pètent dans la soie des ministères à arroser les amis - la préface "Le théâtre et la culture" au célèbre "Le Théâtre et son double" du même Artaud : 
"Jamais, quand c'est la vie elle-même qui s'en va, on n'a autant parlé de civilisation et de culture. Et il y a un étrange parallélisme entre cet effondrement généralisé de la vie qui est à la base de la démoralisation actuelle et le souci d'une culture qui n'a jamais coïncidé avec la vie, et qui est faite pour régenter la vie (...) Le plus urgent ne me paraît pas tant de défendre une culture dont l'existence n'a jamais sauvé un homme du souci de mieux vivre et d'avoir faim, que d'extraire de ce que l'on appelle la culture, des idées dont la force vivante est identique à celle de la faim."

Pour les étourdis, souvenons nous qu'Antonin Artaud est mort voilà soixante-dix ans. Aussi, est-il nécessaire de préciser que cette préface sonne aujourd'hui avec une étonnante modernité ? 
(petit lien non promotionnel sur la page Artaud du site Gallimard).
Alors oui, Bernanos aussi va entrer dans le domaine public dans une semaine. Mais l'exilé amoureux du Brésil a souvent les faveurs des ondes francophones financées par les deniers publics. Qu'en est-il d'Artaud ? Comment un ministère dont la principale mission est de poser la Culture au-centre de tous les débats peut-il oublier un homme dont toute l'existence a brûlé au cœur même de toutes les Cultures ? Surréaliste, homme de théâtre et acteur, poète, dessinateur, l'ombre d'Artaud parait si puissante que personne ne semble en mesure de la célébrer comme il se doit. 

Celui qui en 1937 fut déclaré "dangereux pour l'ordre public et la sûreté des personnes" et interné, est-il victime d'un trop plein d'esprit et de talent ? Après l'avoir fait mourir à petit feu à coup de violents électrochocs, il semble que les gardiens du temple de la médiocrité proclamée préfèrent célébrer une loi à la con plutôt qu'une comète aveuglante de lumière. 
Artaud qui par delà sa mort continue de nous hanter comme le promettaient déjà les dernières lignes retrouvées de sa main avant son décès en 1948 et qui annonçaient la couleur : 
"De continuer à 
faire de moi 
cet envoûté éternel"

lundi 24 décembre 2018

Lecture : Nickolas Butler - Retour à Little Wing

Que reste t-il des promesses d'enfance et des souvenirs partagés avec ses amis les plus anciens lorsque la vie, ses épreuves et ses doutes, sont passés par là ? 
Qu'ils soient devenus des célébrités ou des anonymes, qu'ils aient parcouru le monde ou pas bougé de chez eux, ces quatre amis d'enfance partagent une origine commune : Little Wing, petite bourgade du midwest. 

Sur un thème universel et ultra connu, ultra abordé, Nickolas Butler a écrit en 2014 un premier roman sensible et intimiste, qui sonne comme une madeleine de Proust au moment d'évoquer la ligne de séparation des eaux entre enfance et âge adulte, depuis les rives d'un pays doré qui est celui des premiers souvenirs. On prend plaisir à faire la connaissance des personnages de ce roman, plutôt attachants, on pénètre simplement dans leur intimité, grâce à une écriture douce à défaut de personnelle. On découvre leurs secrets d'enfance, leurs histoires, leurs amitiés, leurs amours et tout ce qui dans le sillage de ces sentiments forment des personnes qui traversent les années. 

Hank, Lee, Ronny et Kip forment le noyau dur, historique, de toutes les histoires qui se tissent autour de Little Wing, le centre d'attractions de ce roman tout en nostalgie et en souvenirs. Contemplatif par moments sans être pénible, environnemental sans être naturaliste, ce bouquin souffre malgré tout de quelques défauts. Kip est le personnage le moins réussi de ce livre, c'est un archétype un peu trop appuyé. Quelques scènes sont parfois un peu trop plaquées sur le récit, et emmenées sans grande finesse, comme pour placer un moment nostalgie, un moment tendresse, un moment réconciliation etc... J'ai à cet égard été parfois un peu contrarié par l'impression que l'auteur cherchait à placer un scénario de film à venir plutôt qu'à écrire un bouquin avec des personnages riches et perclus de paradoxes. On sent peut être ici la limite des bouquins écrits en atelier d'écriture... Néanmoins, malgré ces ficelles un peu trop grosses et une fin un peu faible, je me suis laissé embarquer dans ce coin du midwest, et j'ai apprécié la balade avec ces quatre amis d'enfance.

Extrait
"Avec les enfants, les bébés, il est possible d’attendre trop longtemps. Mon père disait toujours : « A trop hésiter, on se perd. » Pour les hommes, ça n’a pas d’importance. On peut être roi à quatre-vingts ans, baver sur le trône, a peine capable de garder la couronne sur la tête : ça n’empêche pas de faire un enfant a une belle jeune femme. Mais pour les femmes, c’est différent. Toute cette histoire d’horloge… c’est vrai. Réfléchissez-y. Une fois par mois, l’ovule effectue sa descente, comme accroché a un petit parachute, et il atterrit dans une vallée de sang. Encore faut-il savoir que l’œuf est là, espérer que les conditions soient parfaites, que l’ovule soit bel et bien arrivé, qu’il y ait des ovules. Et que le parachute se soit bien ouvert exactement au bon moment. Tout cela relève d’une précision d’horloger, comme le mécanisme d’un système complexe et délicat. Et lors des nuits passées au côté de Felicia, j’entendais son tic-tac et ça me foutait une trouille d’enfer."
Lors du festival America 2014, la librairie Mollat a rencontré l'auteur autour d'une petite vidéo :  

samedi 22 décembre 2018

Lecture : Frédéric Berthet - Daimler s'en va

« Depuis que Raph (Raphaël Daimler, dit Raph, ou Daimler, mais rarement Raphaël) était mort, j'avais pensé à lui de temps en temps - mais j'avais surtout rêvé une fois de lui : nous déjeunions ensemble dans les jardins de Babylone. »

Babylone et les détectives privés font bon ménage, Richard Brautigan nous l'a déjà montré dans le très efficace "Un privé à Babylone". Dans "Daimler s'en va", Frédéric Berthet met en scène un être étonnant, un Raphaël Daimler dont les aventures tragi-comiques virent au franchement absurde dès les premières pages. Sitôt que l'être aimée décide de le larguer, point de départ classique à une histoire qui ne l'est pas du tout. 
Dans ce court roman qui lorgne parfois du côté de l'exercice de style, Frédéric Berthet alterne le grave et le loufoque, le léger et l'absolu. La forme même de ce petit bouquin interpelle, avec sa succession de petits fragments comme éparpillés et rassemblés, parfois sans qu'un lien évident entre chacun ne se dessine.
Le destin de Daimler, on le comprend très vite, est de disparaitre. Mais avant de partir, l'anti-héros nous raconte sa vie, ses doutes, dans un style parfois décousu mais toujours personnel. Une voix. Et c'est tout ce qui compte. 

Extrait
A part ça, il règne dans ce gymnase désert, où il y a de quoi tomber d'insolation avant le prochain point d'eau, une ambiance de préau étouffant, dans une école communale désaffectée. Envahie par les dunes de sable qui progressent d'un kilomètre par an, dans une petite ville aux limites du désert, d'où tous les habitants auraient été chassés par la peste et la myxomatose, ou les odeurs de chaussettes sales. Bordel.

jeudi 20 décembre 2018

Lecture : Franck Venaille - La bataille des éperons d'or

Franck Venaille n'est plus. Il a quitté le monde des vivants en août 2018. Mon inculture crasse ne me l'a fait découvrir qu'après son départ pour les limbes, à l'occasion d'un passage à la Librairie de Paris, place de Clichy, courant septembre. Là où sur une table présentant les nouveautés et les bouquins à la une, un libraire avait disposé deux ou trois ouvrages du poète.

Communiste engagé puis dégagé, producteur à France Culture, il écrivait dans son livre "Ça" en 2009 : 
"Ce qu’il faut c’est bien regarder à l’intérieur de soi. Le cri vient vite dès que les images se font plus nettes. Las ! Pas assez. Pas assez crié à la mort. Hurlé oui. Mais pas assez. Je vous en conjure : criez pendant qu’il est temps encore."

"La bataille des éperons d'or" est le nom que l'on donne à la Bataille de Courtrai qui s'est tenue en 1302 et qui a opposé belligérants flamands et français. 

Dans ce recueil publié en 2014, Venaille s'intéresse toutefois à une autre guerre qu'il a connu de manière intime. La guerre d'Algérie a bouleversé Venaille lorsqu'il y a pris part à l'âge de 20 ans. Après l'avoir déjà abordée dans de précédents ouvrages, il y revient ici. Dans une langue riche et protéiforme qui alterne la prose, la versification - libre ou pas - Venaille dénonce l'absurdité du conflit et ce qu'il détruit d'humanité en chacun de nous. Enchaînant les souvenirs d'époques diverses et le constat de celui qu'il est à près de 80 ans, Venaille se fait mélancolique mais sans être résigné. Il s'interroge et il s'étonne. Il dénonce et combat. Tout ce qui construit la poésie, en fin de compte.

Extrait



mercredi 19 décembre 2018

L'extrait du... 19 décembre

Comme d'autres relisent un évangile, je relis régulièrement Jim Harrison. J'y reviens toujours. En ce moment c'est "Dalva" qui est sur ma table de chevet. Et je redécouvre à nouveau ce roman exceptionnellement touffus, dense et riche. 

Alors aujourd'hui, deux extraits de ce roman étourdissant.

Une impression onirique de lucidité et de force peut-être imméritée m'a submergée quand je me suis rappelé une chose qu'avait dite grand-père en me retrouvant après ma promenade dans les collines, au-delà de la Niobrara : à savoir que chacun doit accepter son lot de solitude inévitable, et que nous ne devons pas nous laisser détruire par le désir d'échapper à cette solitude.

J'ai dressé la liste des choses, des gens et des lieux qui allaient me manquer, mais rien ni personne ne m'a remuée autant que le souvenir des arbres et surtout celui du Pacifique que j'avais écouté pendant tant de jours et de nuits que je pensais souvent à l'existence d'un langage qui nous aurait été commun : peut-être un langage non verbal, frisant la folie, le murmure du sang dans les veines, le chuintement de l'eau qui reflue, mais un langage malgré tout.

vendredi 14 décembre 2018

L'extrait du... 14 décembre

"Avec moi dieu-le-chien, et sa langue qui comme un trait perce la croûte de la double calotte en voûte de la terre qui le démange. Et voici le triangle d’eau qui marche d’un pas de punaise, mais qui sous la punaise en braise se retourne en coup de couteau. Sous les seins de la terre hideuse Dieu-la chienne s’est retirée, des seins de terre et d’eau gelée qui pourrissent sa langue creuse. Et voici la vierge-au marteau, pour broyer les caves de terre dont le crâne du chien stellaire sent monter l'horrible niveau."

Antonin Artaud - L'ombilic des Limbes (Gallimard Poésie)

lundi 10 décembre 2018

Lecture : Richard Brautigan - Le monstre des Hawkline

Richard Brautigan est une preuve du pouvoir de la littérature. D'un point de vue objectif et rationnel, ses livres sont souvent mal gaulés sur le plan formel, erratiques, mal équilibrés mais toujours très bien traduits (normal c'est Brice Matthieussent qui opère). 
Pourtant, à chaque bouquin de lui que je lis - ou plutôt que je relis depuis quelques années - je suis emporté par un enthousiasme débridé. C'est à l'occasion de la nouvelle édition dans la collection "Titres" des éditions Bourgois que je me suis offert la relecture de son "Monstre des Hawkline". Et une nouvelle fois je me suis replongé dans son univers décalé, poétique et foutraque avec le même plaisir. Malgré l'effet de surprise de la découverte qui s'est envolé depuis longtemps déjà. 

Avant de déconstruire le polar dans l'excellent "Un privé à Babylone" trois ans plus tard, Brautigan s'attaque au western dans "Le monstre des Hawkline" en 1974. On y retrouve l'univers déjanté du poète beat c'est à dire ces situations loufoques et ses phrases qui poussent comme des roses trémières sur un périphérique urbain. Ce qu'on aime chez lui, ce sont ces personnages qui n'entrent pas dans les cases et ce style inimitable. Des héros qui n'en sont pas, comme ces deux cow-boys chasseurs de primes qui sont engagés par Magic Child et Miss Hawkline pour les débarrasser d'un étrange monstre vivant sous leur maison. 

Comme souvent chez Brautigan, le début du roman est très réussi. Le lecteur est immédiatement capté dans ses filets, relâchés et étranges, comme un monde enfanté dans les émanations de la marijuana. La suite est parfois un peu plus discutable, l'auteur se perd un peu dans les explications parfois vraiment perchées sur la présence du monstre sous le plancher de Miss Hawkline. Et c'est peut être révélateur d'un certain inconfort de Brautigan à expliquer l'inexplicable, pourquoi pas y voir une tentative de justifier ce qui n'a pas à l'être, comme sa vie elle-même qu'il chercha à expliquer sans y parvenir. Bref, la suite souffre de quelques atermoiements coupables mais le style est toujours là, avec au détour d'un paragraphe un peu discutable une de ces phrases dont il a le secret : "Puis le monstre des Hawkline se coula jusqu'en haut de l'escalier, comme une chute d'eau à l'envers

Extrait
Ils étaient tapis avec leurs carabines dans le champ d’ananas et regardaient un homme donner à son fils une leçon d’équitation. Cela se passait à Hawaii en 1902.
Ils n’avaient rien dit depuis un long moment. Ils restaient simplement accroupis là à épier l’homme, l’enfant et le cheval. Et ce qu’ils voyaient ne leur plaisait pas.
- Je ne peux pas, dit Greer.
- Quelle déveine ! dit Cameron.
- Je ne peux pas tuer un homme en train de donner à son fils une leçon d’équitation. Ce n’est pas dans ma nature, dit Greer.
Greer et Cameron se sentaient dépaysés au milieu de ce champ d’ananas. Hawaii ne leur convenait guère. Tous deux portaient des vêtements de cow-boy qui évoquaient l’Oregon de l’est

Richard Brautigan - Le monstre des Hawkline (Bourgois) 208 pages, 7 €

vendredi 7 décembre 2018

Lecture : Sophie Divry - Trois fois la fin du monde

Sophie Divry ne perd pas de temps. Après un premier roman publié à l'âge de 31 ans, elle enchaîne les livraisons et publie 6 bouquins en l'espace de 9 ans.
Son dernier roman s'est attiré la sympathie des critiques et des libraires qui l'ont mis en avant dans les médias et les vitrines. "Trois fois la fin du monde" est paru fin août aux éditions Noir Sur Blanc.
Le problème avec ce bouquin c'est qu'il ne faut pas trop en dire. D'une manière générale je conchie la quatrième de couverture d'un bouquin. Je déteste ça, la quatrième de couverture. Je rapproche cela d'une tentative de massage cardiaque sur un nouveau né qui respire pourtant très bien. Mais parce qu'on veut que le nourrisson soit d'une jolie couleur rose pour plaire aux parents, on te le fout sous une couveuse. Bref, un exercice mercantile qui coupe les jambes, voilà ce que c'est la quatrième de couverture.

Un bouquin ça se cueille comme un coquelicot rouge sang sur le bord de la route. On le feuillette, on lit le début, au hasard, quelque part plus loin, sur le bord d'une page et on décide qu'on a un truc à se raconter lui et nous. Et on laisse tomber la quatrième de couverture. Moi je ne choisis pas un livre pour une promesse que je lui demande de remplir. 

Au début de ce roman, il est question d'un braquage qui tourne mal et d'un gars qui se fait arrêter. Son frère et complice a perdu la vie lors de ce braquage, lui va se retrouver derrière les barreaux, dans une prison hyper violente. Sophie Divry livre une première partie de bouquin franchement réussie, qui nous plonge dans une réalité fantasmée mais que l'on imagine bien réelle de l'état pitoyable des prisons françaises. 
On se demande comment le narrateur va se sortir de ce pétrin carcéral et d'un habile changement de partie, l'autrice (ouais, moi je dis pas auteure, parce que c'est dégueulasse) nous balance hors les murs et hors les gens. Comme je n'avais pas lu le résumé du livre, j'ai été très surpris par ce changement de ton et de cap. Et c'est bien ce qu'on demande à un bouquin, aussi, de nous surprendre. 
Cette seconde partie, une fois la surprise passée, m'a un peu moins enthousiasmé. Sophie Divry est une personne engagée dans plusieurs mouvements collaboratifs et associatifs, elle défend ici une certaine vision de la nature en même temps qu'elle revisite le thème du naufragé à la "Vendredi et la vie sauvage". Ce n'est pas raté mais le message est un peu trop appuyé à mon goût. On sent qu'elle a pris du plaisir à écrire ces passages naturalistes et à développer la psychologie du personnage face à son environnement. Mais justement, j'aurais préféré voir le personnage évoluer différemment, je suis un peu resté sur ma faim sur ce point-là. Pas de quoi remettre en cause toutefois mon avis plus que positif sur ce très bon bouquin d'une autrice que je découvre à cette occasion.

Pour ceux qui ont 14 minutes, voici le lien sur le passage récent de Sophie Divry à l'émission "La grande librairie" : 


mercredi 5 décembre 2018

Lecture : Olivier Lebé - le silence du moteur

J'ai rencontré Olivier Lebé à l’occasion de son passage à la Librairie de Paris, place de Clichy, courant Septembre. Ce grand type filiforme et élégant, au regard pénétrant s’est posé devant nous et s’est mis à répondre aux questions du monsieur Loyal de la librairie, devant une pile de son roman « Le silence du moteur ».
Ancien musicien, ancien compositeur, ancien californien, l’auteur a mis dans ce dernier tous ces ingrédients à la fois, a passé un coup de shaker et nous propose un bouquin franchement réussi. Si je n’avais pas poussé la porte de la Librairie de Paris ce soir-là après une journée de formation professionnelle loin de chez moi, j’aurais loupé ce roman. J’ai même découvert à cette occasion les éditions Allary à qui j’ai adressé le manuscrit de « Brûler à Black Rock » dans la foulée.

« Le silence du moteur » c’est une roman américain qui n’en est pas un. Olivier Lebé réussit en effet le tour de force d’écrire une histoire « sur la route » qui se passe surtout à Los Angeles. Tous les ingrédients d’un road movie sont présents mais c’est autre chose. Allégorie d’une certaine forme de vie qui s’agite mais dont on ne sait où elle se dirige, sinon qu’elle nous fait avancer. Avec des petits rappels discrets mais efficaces sur la chute qui nous menace tous. J’ai été très touché par cette histoire d’un père et de sa fille adolescente borderline. Ma fibre de père de pré ado, ma fibre de lecteur d’une certaine littérature de l’errance aux USA, je ne pouvais décemment pas louper ce roman original, foutrement bien écrit, sensible, sans voyeurisme.

Extrait : "Elle avait dessiné des gardiens autour d'une trappe d'aération dans sa chambre de petite fille, pour empêcher les diables d'entrer. Elle se réveillait en pleine nuit, tremblante, hallucinée, incapable de parler. Elle ne trouvait pas les mots pour les décrire, mais je crois que ses cauchemars étaient semblables aux miens, à ceux que je faisais enfant. J'étais terrifié par des angles aberrants, des géométries impossibles. J'ai encore en moi la sensation de glisser, d'être avalé par le néant. Je crois que c'est ce qui lui est arrivé. Le vide l'a prise. Elle tombe. Elle n'en finit pas de tomber."

lundi 3 décembre 2018

L'extrait du... 3 décembre

Entre deux pages de romans et d'autres livres, je continue la lecture en dilettante du Journal de Jules Renard déniché cet été à Montréal dans la collection Bouquins. 
Certains extraits qui concernent des personnages de la littérature du XIXème siècle sont moyennement intéressants. En revanche, les assertions et les phrases courtes un peu définitives que Renard assène entre deux blocs de biographie de salon sont souvent remarquables. 


jeudi 29 novembre 2018

L'extrait du... 29 novembre

Très tôt ce matin, après avoir achevé la lecture de "Trois fois le tour du monde" de Sophie Divry tard dans la soirée et enchainé durant la nuit avec la lecture de la poésie de Franck Venaille, j'ai commencé à lire "Daimler s'en va" le roman mythique de Frédéric Berthet réédité cette année à La petite vermillon.
Dès les premières lignes de ce bouquin court (130 pages) on est happé par la voix singulière de l'auteur qui, à la manière d'un Brautigan auquel on le relie immanquablement, prouve que l'originalité combiné à la brièveté, constitue une bonne recette littéraire. 

L'extrait qui suit est tiré du tout début du roman, il s'agit d'un des premiers paragraphes qui place le point de départ de l'histoire. 


mercredi 28 novembre 2018

Richard en Titres

Dans le chantier permanent de la réédition, il convient de signaler en ce crépuscule de l'année 2018 l'initiative des éditions Christian Bourgois. Alors d'accord je ne serais pas objectif. Car cet éditeur est certainement celui que j'apprécie le plus et celui qui reste le plus abondamment représenté dans ma bibliothèque. Rendons ici gloire au défunt Jean-Claude Zylberstein qui créa le fameux "Domaine étranger" au sein de la maison parisienne et qui permit de faire connaitre des auteurs aussi mythiques que John Fante ou Jim Harrison (excusez du peu). 
En cette année 2018, les éditions Christian Bourgois ont la riche idée de rééditer tout le catalogue de Richard Brautigan en poche dans la collection "Titres".
L'occasion rêvée pour tous les fans du hippie lunaire trop vite disparu de se replonger dans ces histoires un peu simples, en décalage permanent avec la vie, comme en marge de tous les quotidiens. Et pour tous ceux qui ne connaissent pas l'univers de cet auteur de le découvrir.

Extrait de "Un privé à Babylone" (n°213 collection Titres)
"Après ça, je pourrais donner quelques dollars à ma propriétaire et lui dire que le fourgon blindé dans lequel on m'envoyait mon million de dollars s'était perdu dans le brouillard de cactus près de Phoenix , dans l'Arizona , mais qu'il ne fallait pas qu'elle s'inquiète : il était maintenant certain que le brouillard allait se lever d'un jour à l'autre et l'argent arriver.
Si elle me demandait ce que c'était qu'un brouillard de cactus, je lui dirais que c'était le genre de brouillard le plus terrible parce qu'il était plein de piquants. Qu'une fois pris dedans, il était extrêmement risqué de se déplacer. Que le mieux c'était de rester sur place et d'attendre qu'il s'en aille. Mon million de dollars attend que le brouillard se dissipe."















lundi 26 novembre 2018

Faire part 2018


Il est né.
Il pèse 275 pages. 
Il est rouge.
Il a un nom pas facile à porter.

J'ai validé le BAT de ce nouveau roman qui est  donc, maintenant, prêt à être lu par des hordes de lecteurs fanatiques qui vont cesser de s'alimenter, de dormir, et de travailler pour se lancer, toutes affaires cessantes, dans la lecture.

Bon, de façon plus prosaïque, ce roman est pour l'instant disponible et commandable en version papier sur le site de Lulu et bientôt chez le grand méchant Jeff. Et pour les branchés des nouvelles technologies qui lisent sur écran, disponible sur Kobo et Kindle.






lundi 19 novembre 2018

L'extrait du jour

L'extrait du jour provient de la lecture en cours du recueil de poèmes de Jim Harrison intitulé "Une heure de jour en moins". 

vendredi 16 novembre 2018

Bon à quoi ?

Bon à tirer : en imprimerie, pour qualifier l'épreuve contractuelle finale validée  par le client, avant que ne soit lancée l'impression des documents commandés.

En temps normal, cette étape de relecture du bon à tirer pour validation ne me prend pas beaucoup de temps. Il s'agit simplement de vérifier l'impression du livre et sa mise en page. Contrôler les marges, les enchaînements de paragraphe, les pages vierges et la pagination. Sauf que pour ce nouveau roman, j'ai lancé le bon à tirer un peu trop tôt par rapport à d'habitude. En commençant à relire le bon à tirer, j'ai trouvé une ou deux coquilles, puis une troisième... De fil en aiguille, je me suis retrouvé à griffonner le livre et à me taper une quatrième relecture corrective. C'est un peu long et j'avoue commencer à saturer de ce cycle perpétuel de relecture / corrections. Mais c'est une étape indispensable pour obtenir un bouquin le plus abouti possible avant de le proposer aux lecteurs. 

Comme je l'ai déjà dit ici même, l'écriture d'un livre présente de nombreux points communs avec la course d'ultrafond. Dans les deux domaines, il faut savoir s'économiser, se remettre en question, ne jamais perdre de tête l'objectif, et surtout découper la tâche en une succession de petites actions qui semblent réalisables. 
Dans quinze jours cela fera un an que je travaille sur ce roman, la publication sera une belle façon de fêter cet anniversaire ! 

lundi 5 novembre 2018

Lecture : Bill Bryson - L'été où tout arriva

Loin de toute tentation de célébration du temps passé, il est parfois bon - et souvent instructif - de se retourner sur le chemin de l'humanité. Surtout lorsque l'époque que l'on redécouvre se situe dans un passé proche.

1927. Plus précisément l'été 1927 en Amérique du Nord. Les premiers voyages transatlantiques, les combats de boxe légendaires, la Ford T, les matches de base ball truqués, l'émergence du parlant à Hollywood, la sculpture du mont Rushmore, la prohibition, la crise économique en devenir, les attentats anarchistes... Autant de sujets qui agitèrent les trois mois de l'été américain.

Délaissant les récits de voyages qui ont fait sa renommée, Bill Bryson brosse le portrait de cette Amérique de l'entre deux guerres au travers de près de 600 pages dont très peu sont à jeter. S'appuyant sur une énorme documentation qui est signalée en fin d'ouvrage, Bryson alterne les séquences et les ambiances. D'une écriture légère et gentiment ironique, il brosse les destins tour à tour étranges, héroïques, sinistres ou malheureux d'une gloire du base ball, d'un acteur de second plan, d'un banquier, d'un constructeur automobile, d'un président, d'un caïd de la pègre. Certains ont laissé leur nom dans l'histoire et on se fait un plaisir de lire ainsi leur biographie résumée et remise dans le contexte. D'autres ont disparu des mémoires et on mesure que la renommée ne tient pas à grand chose. 

Le problème c'est qu'en moins de 600 pages, en couvrant un si large éventail d’événements et de personnages, Bryson ne peut que rester en surface des choses. L'auteur y ajoute parfois son grain de sel qui fleure bon la pensée unique et le discours convenu de notre époque. Inutile d'imaginer que vous allez devenir un spécialiste de l'époque ou d'un événement en particulier. Il ne s'agit pas d'un livre d'histoire. Mais le plus drôle ce sont toutes ces anecdotes insolites parfois, drôles souvent, qui accompagnent ces destins célèbres ou brisés. Et qui mettent en relief l'actualité récente en l'éclairant de cette lumière du temps qui passe. Et rien que pour celles-ci, ce bouquin mérite vraiment la lecture. 

dimanche 4 novembre 2018

Il sera rouge

Le bon à tirer est finalisé. Et commandé pour ultime relecture... 


mardi 30 octobre 2018

La citation du jour



Détruis-toi pour te connaître
Construis-toi pour te surprendre
L'important n'est pas d'être
Mais de devenir


Franz Kafka

Version 4 terminée

Quand le week-end du changement d'heure, la météo est chafouine, et que vous avez un roman à finir de corriger, et pas les enfants à garder, tout est réuni pour être productif. J'ai donc passé la majorité du week-end dernier à corriger ce nouveau roman, après un nouveau cycle de relecture qui m'avait occupé une dizaine de jours durant.

Au final, me voici avec une quatrième version qui, sauf revirement de dernière minute (j'attends encore le retour de deux béta lecteurs) devrait être la version définitive. Les retours d'un troisième béta lecteur durant ce week-end sont tombés à pic et m'ont été très utiles. Suite à ce retour, j'ai pas mal cogité sur l'un des personnages, me demandant si je devais le modifier ou non. Si j'ai finalement choisi de ne pas trop le changer, j'ai adouci son portrait dans la scène qui le présente. Et j'ai également modifié une autre scène pour y insérer un petit hommage à l'un des personnages de "Des chardons dans la garrigue", mon roman de 2017. J'espère que les lecteurs qui me suivent depuis plusieurs bouquins maintenant apprécieront ce minuscule clin d'oeil. 

Voilà, l'étape 8 de la génèse de "Après les parenthèses" est terminée : 
8 - Corrections du 3ème jet : 26 au 28 octobre
7 - Relecture corrective du 3ème jet : 15 au 25 octobre 
6 - Réécriture : 9 au 14 octobre
5 - Relecture corrective du 2ème jet : 3 septembre au 8 octobre
4 - Ecriture du 2ème jet : 17 avril au 2 septembre
3 - Relecture corrective du 1er jet : 1er au 16 avril
2 - Ecriture du 1er jet : 3 janvier - 31 mars
1 - Rédaction du plan : 1er décembre 2017 - 1er janvier 2018 

Rendez-vous fin novembre pour la publication ! 

vendredi 26 octobre 2018

Roman 2018 : on voit la tête !

Je viens de terminer la relecture de la troisième mouture de ce nouveau roman dont le titre définitif sera "Après les parenthèses". 
Je vais dès ce soir me mettre à corriger le tapuscrit pour aboutir à une quatrième version qui sera très proche de la version finale. Suite aux premiers retours des bêta lecteurs (que je remercie chaudement au passage) j'ai procédé à quelques retouches sur les premiers chapitres. Je me posais la question de supprimer un personnage mineur mais j'ai finalement décidé de le garder, même si oui, il aurait pu être mieux traité. 
J'ai toujours pour ambition de finir ce roman en novembre pour le lancer en édition à la demande avant mi-décembre. 

Historique de la genèse de ce roman
7 - Relecture corrective du 3ème jet : 15 au 25 octobre 
6 - Réécriture : 9 au 14 octobre
5 - Relecture corrective du 2ème jet : 3 septembre au 8 octobre
4 - Ecriture du 2ème jet : 17 avril au 2 septembre
3 - Relecture corrective du 1er jet : 1er au 16 avril
2 - Ecriture du 1er jet : 3 janvier - 31 mars
1 - Rédaction du plan : 1er décembre 2017 - 1er janvier 2018 

J'en suis donc à l'étape 8 : réécriture de ce qui va constituer la quatrième version du manuscrit. Et la dernière importante avant l'ultime relecture qui se fera sur le bon à tirer. 

jeudi 25 octobre 2018

Goncourt : qu'est ce qu'on s'emmerde !

Dans cinq jours maintenant on connaîtra l'ultime sélection des romans en lice pour le Goncourt 2018. Comme chaque année, les mêmes éditeurs, comme chaque année les mêmes bouquins qui tournent depuis le mois d'août dans les émissions de radio, les émissions de télé, les chroniques, les flashes, les publicités... à croire que la littérature française se réduit à un échantillon d'auteurs et de styles que nous sommes condamnés à nous cogner tout le temps. Donc on s'emmerde avec le Goncourt mais au moins, à la différence du Nobel, on n'a pas encore de problème d'agression sexuelle. 
Et en attendant, chez Drouant, on met les petits plats dans les grands.

En attendant voici la sélection actuelle des demi-finalistes du Goncourt 2018 : 
- Pauline Delabroy-Allard, "Ça raconte Sarah" (Minuit)
- David Diop, "Frère d'âme" (Seuil)
- Paul Gréveillac, "Maîtres et esclaves" (Gallimard)
- Nicolas Mathieu, "Leurs enfants après eux" (Actes Sud)
- Tobie Nathan, "L'évangile selon Youri" (Stock)
- Daniel Picouly, "Quatre-vingt-dix secondes" (Albin Michel)
- Thomas B. Reverdy, "L'hiver du mécontentement" (Flammarion)
- François Vallejo, "Hôtel Waldheim" (Viviane Hamy)

lundi 15 octobre 2018

L'extrait du jour

J'ai profité du week-end pour lire deux petits livres très différents l'un de l'autre. Après l'exotisme du "Willard et ses trophées de bowling", la sobriété du premier roman de Jules Romains "Mort de quelqu'un".

Un roman écrit en 1910 mais dont le style reste étrangement actuel, avantage de cette sobriété. Il convient en revanche d'avoir le moral au moment de lire ce roman qui raconte la mort soudaine d'un homme dont personne se soucie. Clairement pas la lecture qui convient au spleen d'un dimanche soir ! 

"Alors, entre les murs de la chambre, sans qu'une parole se dise, quelque chose d'essentiel passe de l'homme qui meurt à l'homme qui survit.
Si personne ne veille auprès du lit, tout sort de la chambre, s'enfuit, s'égare, et va mordre on ne sait quoi, comme un chien enragé ..."

Jules Romains - Mort de quelqu'un

lundi 8 octobre 2018

L'affaire de Marco Koskas et du Renaudot

Décidément la rentrée littéraire n'a jamais été si amusante et intéressante que cette année. 
L'apparition d'un livre autopublié sur Amazon sur les listes initiales des aspirants au prix Renaudot 2018 avait déclenché les premiers émois des pourfendeurs du géant de la distribution. Les défenseurs psychorigides de la librairie indépendante se mettant joyeusement sur la gueule avec les libertaires consuméristes adeptes du clic & pay. Et tous les acteurs du marché de se lancer dans la bataille, au nom d'une liberté, au nom d'un principe, au nom de mille idées toutes aussi tragiques les unes que les autres. (Brassens chantait déjà "Mourir pour des idées" en 1972)

Avec le livre de Marco Koskas qui vient de disparaître des listes du Renaudot, l'opposition entre les deux camps est monté d'un cran dans la férocité.
Lecteurs, éditeurs, distributeurs, journalistes, moralistes, jurés : tout le monde se sent contraint de donner son idée, de justifier ou de discourir sur le sujet. Deux thèmes belliqueux s'additionnent et les motifs de querelle se multiplient : autoédition contre édition traditionnelle d'un côté, géant de la distribution contre petit commerçant de l'autre. Sur les forums spécialisés, les injures fusent, les noms d'oiseaux se conjuguent sur toutes les branches. Bref, c'est la foire d'empoigne et ça nous change des petites querelles de clocher habituelles que cette mascarade des prix littéraires suscite habituellement au sortir de l'été.

Mais le plus dingue dans l'histoire c'est que personne ne se demande ce que vaut vraiment l'ouvrage incriminé. Le "Bande de Français" de Marco Koskas est-il un bouquin qui vaut tant de tapage ? C'est à croire que tout le monde s'en fout, au fond, du bouquin. Et c'est quand même un comble.