mercredi 26 septembre 2018

Lecture : Microfictions

Lors de la publication de "Microfictions 2018" aux éditions Gallimard, les radios et les journaux spécialisés se sont largement fait l'écho de ce monument de mille pages signé de la main de Régis Jauffret. Quelques mois après cette parution, le bouquin a même écopé d'un bandeau rouge mentionnant qu'il avait décroché le prix goncourt de la nouvelle.
La nouvelle est historiquement un genre que goûtent peu les lecteurs Français, qui lui préfèrent l'ampleur du roman. En tant qu'auteur, la nouvelle est un exercice périlleux nécessitant de faire preuve de brièveté. Une vertu difficile dont l'efficacité est un corollaire qui ne se commande pas. Certains pourtant s'en sortent très bien. Et Régis Jauffret est passé maître dans l'art de la très courte nouvelle. Bien que contrairement à ce que plusieurs critiques des ondes l'ont annoncé à la sortie de ce recueil, non Jauffret n'a pas inventé la microfiction.

En 2007, le même Jauffret avait commis une première mouture de textes très courts baptisés "Microfictions" et qui rassemblait 500 textes d'une page et demi chacun. Les thèmes chers à l'auteur s'y retrouvent, essentiellement des histoires sombres de misère sociale, affective, sexuelle, quand ce ne sont pas les trois à la fois. 

Autant le dire tout de suite, si l'on est un dépressif chronique, il sera difficile de lire d'une traite ces 1000 pages éprouvantes. Viols, incestes, pressions psychiques, destins brisés, assassinats sanglants, sexe : rien ne nous est épargné. Cela confine parfois au grotesque, flirte avec la farce, en fait des tonnes, tend franchement à la redite, aussi... Mais au final on continue pour voir si Jauffret tient la distance. Certains textes sont plus faibles que d'autres, certains ont une chute brillante quand d'autres ont une fin sèche. Une page et demi, ça ne laisse pas de temps à l'éparpillement, il faut aller à l'essentiel, désossé le texte et on ne peut qu'apprécier le travail littéraire. 

J'ai aimé cette lecture malgré la tendance au TROP. Trop de noirceur, trop de redondances, c'est un exercice de style certes mais qui aurait gagné à être plus court lui aussi. 
Je vais malgré tout reprendre un peu d'air avant de me plonger dans la mouture 2018 et les 500 nouveaux textes livrés par Jauffret. D'autant plus qu'aux dernières... nouvelles, il serait en train de préparer un troisième recueil ! 

Extrait - "Cailloux bleus"

- Je suis écorchée vive.
Je souffre et je n'oublie rien. Même les gens qui me bousculent sans l'avoir voulu me causent une insupportable douleur. Mon mari m'a laissée tomber il y a huit ans, et chaque soir je persiste à l'attendre, comme ce 7 juin 1999 où il n'est définitivement plus rentré. Il est parti avec une femme, avec un homme mais le plus humiliant pour moi c'est qu'il n'est parti avec personne. Il a encore préfèré la solitude à ma présence. On m'a dit qu'il vivait dans l'isolement. Lorsqu'on l'apercevait dans une réception, il ressemblait à un homme de béton dont les yeux brillaient comme deux cailloux bleus. Si on lui adressait la parole, il répondait en riant, mais on sentait qu'il était encore entre ses quatre murs et qu'il envoyait des mots par la fenêtre sans y prêter plus d'attention que s'il jetait sa poubelle (...)

lundi 24 septembre 2018

Vous voulez lire en avant première ?

La phase de réécriture de mon prochain roman avance à grands pas. Je suis en avance sur le planning et je ne peux qu'espérer que les choses continuent sur le même rythme. 
L'épreuve annotée sous une main, le clavier dans l'autre en alternant entre Scrivener pour la réécriture et Antidote pour le correcteur, je profite de chaque instant pour avancer. J'espère terminer cette avant dernière étape d'ici le 5 octobre ... Ensuite, je vais avoir besoin de vous. 
J'annonce donc officiellement l'ouverture des appels à candidatures pour les personnes souhaitant être bêta lecteurs et bêta lectrices de ce nouveau roman. Pour rappel, le principe est de soumettre mon manuscrit en version "presque terminée" à un panel de 4 ou 5 lecteurs en avant première. 

Le bêta lecteur ne DOIT PAS : 
- corriger les fautes. le texte n'est pas en version finale donc ça ne sert à rien
- se mettre à ma place en indiquant les options de scénario qu'il aurait choisi lui.
- être méchant :)
En revanche, le bêta lecteur DOIT : 
- lire le manuscrit en 3 ou 4 semaines maxi. 
- noter ce qui l'a dérangé dans le fil narratif (les erreurs de cohérence, les personnages qui sonnent faux, les situations qui sonnent faux, les longueurs...)
- noter ce qu'il a aimé (en disant pourquoi)
- noter ce qu'il n'a pas aimé (en disant pourquoi)

Si vous vous sentez l'âme d'un bêta lecteur, vous savez où me trouver :) 

jeudi 20 septembre 2018

Paré pour quelques semaines

Voilà. J'ai apporté ma contribution au chiffre d'affaire d'un libraire indépendant.
Il est temps de finir cette semaine de formation pro à Paris, j'ai les yeux plus gros que le ventre... A noter : les rééditions des romans de Brautigan dans l'excellente collection TITRES de Bourgois... 

mercredi 19 septembre 2018

La réédition c'est bon

En déplacement professionnel à Paris cette semaine, je profite des librairies de la capitale et en particulier de la Librairie de Paris, place de Clichy.
L'occasion de croiser quelques auteurs en promotion de leur dernier livre mais aussi de faire quelques achats et de faire le tour des nouveautés. 

Certes le mois de Septembre correspond à la période la plus chargée sur le plan éditorial avec la rentrée littéraire qui sollicite l'attention des médias et les portefeuilles des lecteurs. Néanmoins, la majeure partie de ces nouveautés sera déjà oubliée d'ici Noël. Alors, pour ceux qui auraient du retard, signalons la réédition en poche avec nouvelles maquettes l'intégralité des livres de John Fante. Pour les avoir lus et relus et à nouveau relus récemment en intégrales dans l'édition Compact de Bourgois, je ne saurais que trop vous les recommander... 


jeudi 13 septembre 2018

Librairie à Mont Royal (Montréal)

Durant le mois d'août j'ai posé mes valises au Canada pendant deux semaines. Entre deux évasions dans des endroits sauvages et superbes où mes voisins ont été des castors, des ours noirs et des ratons laveurs, j'ai pu me promener dans quelques villes. Histoire de ne pas oublier la folie de la civilisation moderne, pour ne pas trop souffrir au retour. 

Du côté de Montréal, plusieurs boutiques de livres d'occasion sont installées sur la rue commerçante qui traverse le plateau de Mont Royal. 
Sous un soleil estival et très généreux, j'ai apprécié ces moments de paix et de sérénité que seule une librairie indépendante peut offrir, où que ce soit dans le monde.

J'ai notamment fouiné dans les bacs d'occasion de la librairie "L'Echange" où j'ai trouvé un exemplaire en parfait état du journal de Jules Renard chez Bouquins. Mille pages de papier bible pour moins de sept dollars, y'a pas à dire, la lecture est un plaisir qui ne coûte pas cher.
Cette librairie est lumineuse et accueillante, les vendeurs disponibles et discrets, aimables... Vous y trouverez livres, BD et vinyles. Bref, si d'aventure vous vous promenez à Montréal, et comme vous irez sûrement flaner sur le plateau de Mont Royal, n'économisez pas une visite à cette très sympathique librairie. 

Site Internet de la librairie : http://www.librairielechange.com/

jeudi 6 septembre 2018

1984 encore

Le 1984 d'Orwell est un marronnier qui fait la joie de tous les journalistes plus ou moins assermentés sur les ondes et sur le net. Le chef d'oeuvre de fiction d'Orwell est de tous les bons coups pour justifier ou appuyer telle ou telle analyse politique ou humaine des uns et des autres. On nous met du Orwell à toutes les sauces et on décline ad-nauseum les références à 1984 avec la même régularité qu'un TER de l'ouest lyonnais en dehors des périodes de grève. 

Jusqu'à présent, en France, nous ne disposions que de la traduction des années 1950, celle que nous avons tous lue, sauf ceux qui en parlent le plus - comme toujours en pareil cas. 
Au printemps 2018, Gallimard a osé proposer une nouvelle traduction réalisée par Josée Kamoun, traductrice - entre autres - d'auteurs tels que Philip Roth, Richard Ford et John Irving. Et forcément, quand on touche au marronnier, on s'expose aux foudres des ayatollahs et des fétichistes de la polémique. Parmi ces amateurs du plombage en règle, signalons toutefois la critique argumentée - à défaut de vraiment constructive - de Fortunin Revengé sur Polemia

Et parce qu'il est tout de même mieux de parler des choses à parts égales, je vous invite à écouter l'interview de Josée Kamoun dans l'émission "Le temps des écrivains" de France Culture diffusée le 2 juin dernier (soit quelques jours avant la parution de la critique de Polemia). La traductrice s'y explique notamment sur les raisons de ses choix de vocabulaire et notamment sur le fameux "novlangue" qu'elle a décidé de changer en "néoparler". Crime de lèse-majesté pour les derviches tourneurs de la critique... Mais elle se prête également au jeu de la traduction comparée sur un extrait choisi par Christophe Ono-dit-Biot qui personnellement m'a convaincu.

Aussi de mon côté, loin de ces querelles de clocher, j'ai décidé de relire 1984 à l'occasion de cette nouvelle traduction. En rappelant également que l'oeuvre phare d'Orwell tombant bientôt dans le domaine public, n'importe quel tartuffe pourra maintenant se lancer dans son interprétation personnelle du Big Brother. 

mercredi 5 septembre 2018

L'extrait du... 6 Septembre

Fiodor Dostoïevski - Souvenirs de la maison des morts 

 
Il agit comme un homme ivre, dans un délire. Une fois qu’il a franchi la ligne fatale, il est lui-même ébahi de ce que rien de sacré n’existe plus pour lui ; il bondit par-dessus toute légalité, toute puissance, et jouit de la liberté sans bornes, débordante, qu’il s’est créée, il jouit du tremblement de son cœur, de l’effroi qu’il ressent. Il sait du reste qu’un châtiment effroyable l’attend. Ses sensations sont peut-être celles d’un homme qui se penche du haut d’une tour sur l’abîme béant à ses pieds, et qui serait heureux de s’y jeter la tête la première, pour en finir plus vite. Et cela arrive avec les individus les plus paisibles, les plus ordinaires. Il y en a même qui posent dans cette extrémité : plus ils étaient hébétés, ahuris auparavant, plus il leur tarde de parader, d’inspirer de l’effroi. Ce désespéré jouit de l’horreur qu’il cause, il se complaît dans le dégoût qu’il excite. Il fait des folies par désespoir, et le plus souvent il attend une punition prochaine, il est impatient qu’on résolve son sort, parce qu’il lui semble trop lourd de porter à lui tout seul le fardeau de ce désespoir".


Traduction de Henri Mongault (Folio Gallimard)


lundi 3 septembre 2018

On avance sur les parenthèses

Démarrée le 17 avril au crépuscule, j'ai terminé le deuxième jet de mon prochain roman ce dimanche 2 septembre. Alors oui, cela a été long et j'ai perdu pas mal de temps. La période a été compliquée et n'a pas favorisé la concentration requise pour ce type d'activité... 

Mais voilà, la version 2 du manuscrit provisoirement intitulé "Parenthèses" est terminée. 498 943 signes qu'il va falloir maintenant relire et corriger. Il ne sera pas question d'ample réécriture mais de retouches et d'améliorations, pour aboutir à une troisième version qui ressemblera à la version définitive. Je me donne deux mois pour cadrer le truc, à raison de deux chapitres par semaine. Début novembre on devrait donc y voir plus clair sur la v3.