mercredi 30 janvier 2019

Bon anniversaire Richard

S'il n'avait eu la fâcheuse (ou salvatrice?) idée de se faire sauter la cervelle avec une balle de .44 magnum au milieu des années 80, Richard Brautigan aurait eu 84 ans ce mercredi. 

Alors, bon anniversaire Richard !

Et en cadeau, un extrait tiré du roman "Un privé à Babylone" : 
"(...) Mon appartement est si sale qu'il n'y a pas longtemps, j'ai remplacé toutes les ampoules de soixante-quinze watts par des ampoules de vingt-cinq pour ne plus être obligé de voir tout ça. (...)"

Richard Brautigan 
(30 janvier 1935 - 14 septembre 1984)

lundi 28 janvier 2019

L'extrait du... 28 Janvier

"Lorsqu'on m'a enfin autorisé à entrer dans sa chambre, j'ai trouvé Granp' assis bien droit dans sa blouse d'hôpital aigue-marine, bardé de disques autocollants et de câbles reliés à un électrocardiogramme dont l'écran montrait des pics fluorescents. 
[...] 

Des rides profondes creusaient ses joues et les pattes d'oie s'aggloméraient, telle de la limaille, au coin de ses yeux. Il a desserré les lèvres et découvert ses gencives, un rictus qui pouvait passer pour un sourire. 

- Pas de fleurs ?
- Les fleurs, c'est réservé aux jolies filles.
-- Je suis en robe.
Et ça fait ressortir tes yeux, ai-je dit avant de m'assoeir au bord du lit."

dimanche 27 janvier 2019

Des nouvelles pour 2019

Entre deux lectures, j'avance à un rythme sénatorial sur l'écriture d'un recueil de nouvelles. Après trois années consécutives consacrées quasi exclusivement à la production de trois romans, j'ai ressenti le besoin de m'accorder une pause dans l'écriture au long cours. Et de me frotter à nouveau à l'exercice de la nouvelle, genre avec lequel je n'avais plus frayé depuis plus de dix ans. 

Avant de me remettre au roman en 2015, je me contentais de textes très courts qu'on ne peut pas qualifier de nouvelle, ou alors de micro nouvelle. Il ne s'agit toutefois pas uniquement de sémantique, car le débat se situe ailleurs, dans la façon d'écrire elle-même. Un roman, je m'y consacre entre douze et dix-huit mois. Le temps de pondre un plan plus ou moins serré, de préparer les personnages principaux, d'écrire un premier jet, de réécrire entièrement celui-ci puis de procéder aux multiples relectures et corrections et enfin de le publier. Une micro nouvelle, c'est une histoire qui prend parfois dix minutes à écrire et qui subit très peu de modifications. C'est du sanguin, c'est du brut et forcément, ça n'a pas l'aspect travaillé du roman. J'ai du écrire plus de 1500 micro nouvelles au cours des dix dernières années. La plupart resteront dans les tiroirs, mais certaines sont lisibles dans un recueil que j'ai auto-publié en 2012. 

La nouvelle ne constitue pas un genre très prisé en France, où elle est considérée comme un genre mineur réservé aux auteurs débutants souhaitant exercer leur plume avant de se lancer dans le roman. Chez les anglo-saxons, les choses ne sont pas aussi réductrices et énormément d'écrivains réputés, de romanciers établis, s'illustrent régulièrement dans l'art de la nouvelle, alternant le long et le court avec un plaisir égal.

Plus modestement, après trois années à enchainer trois romans, j'avais besoin de faire une pause en me consacrant à des textes courts mais qui ne relèvent pas de la micro nouvelle. Il s'agit d'intrigues qui m'occupent plusieurs jours, parfois plusieurs semaines mais que je ne me voyais pas développer au-delà de vingt, cinquante ou quatre-vingt pages, et qui dès lors restent confinées à un récit court. Quatre nouvelles sont déjà écrites, corrigées et prêtes à être publiées. Je vais en écrire trois autres dans les semaines à venir. Ce qui fournira la matière d'un recueil de sept textes qui sera publié avant l'été 2019.

vendredi 25 janvier 2019

L'extrait du... 25 Janvier


"L’ennui ne me fait aucune peur. Il y a morsure plus douloureuse : le chagrin de ne pas partager avec un être aimé la beauté des moments vécus. La solitude : ce que les autres perdent à n’être pas auprès de celui qui l’éprouve. A Paris, avant le départ, on me mettait en garde. L’ennui constituerait mon ennemi mortifère ! J’en crèverais ! J’écoutais poliment. Les gens qui parlaient ainsi avaient le sentiment de constituer à eux seuls une distraction formidable. « Réduit à moi seul, je me nourris, il est vrai, de ma propre substance, mais elle ne s’épuise pas… » écrit Rousseau dans les Rêveries."

Sylvain Tesson - Dans les forêts de Sibérie

mardi 22 janvier 2019

Gallmeister et le noir

Je suis en train de lire "Hot Spot", roman de Charles Williams, fraîchement republié par les éditions Gallmeister dans une nouvelle traduction. Je dois confesser mon attachement au travail de la maison d'édition fondée par Olivier Gallmeister. 
Force est de constater qu'à de rares exceptions près, j'ai rarement été déçu par les bouquins à la tranche frappée de la patte de loup. Régulièrement je fais une descente dans une librairie et je repars avec un ou plusieurs "Totem" (le nom de la collection de poche) de cet éditeur spécialisé dans la littérature américaine. Celle qui reste ma préférée, en dépit de quelques infidélités chez les classiques russes et chez quelques francs tireurs francophones.
Quelques esprits chafouins - ou tout simplement jaloux - ont pris ombrage du succès de Gallmeister qui publie régulièrement des pépites, raflant à la fois les faveurs du public et des critiques. 


Je trouve pertinent le travail éditorial de la maison fondée en 2006, entre rééditions de bouquins oubliés et publication d'inédits talentueux. Dans le sillage de porte étendards tels que David Vann ou Edward Abbey, cet éditeur trace une route qui alterne entre mythes fondateurs américains et déglingue noire aux ambiances poissardes. La mention "nature writing" qui est depuis quelques années adossée à ces bouquins ne doit pas être vue comme un pacte de lecture. Il s'agissait sûrement d'une image de marque que les éditions Gallmeister voulaient investir au lancement de la maison mais aujourd'hui il s'agit d'un éditeur installé et réputé dont les productions vont plus loin que cette seule mention publicitaire. Non, le slogan du site internet, "L'Amérique grandeur nature" correspond tout à fait à la ligne éditoriale.

Alors oui c'est vrai que les polars republiés par Gallmeister peuvent être trouvés à vil prix sur les étals des bouquinistes dans de vieilles traductions dans la Série Noire. C'est notamment le cas de ce "Hot Spot" publié en 1955 dans la maison mythique Gallimard sous le titre "Je t'attends au tournant" puis republié chez les multiples avatars Carré Noir et Poche Noir. Mais une nouvelle publication, nouvelle édition, au format poche, avec du papier blanc, moi j'aime bien. Chronique de lecture à suivre.

A lire : l'interview de Benjamin Guérif datant de 2017 mais toujours intéressante sur le site d'actualitté. 

lundi 21 janvier 2019

Lecture : La vallée des dix mille fumées

Parfois le choix d'une lecture est motivée par une raison qui dépasse les critères logiques, artistiques ou affectifs. 
En général un bandeau rouge autour d'un bouquin me fait fuir. Et en ce qui concerne "La vallée des dix mille fumées", la mention de son auteur en police XXL sur ce bandeau ne me parlait guère. Je n'avais alors jusqu'ici jamais lu de bouquin de Patrice Pluyette. Je ne partais donc avec aucun a priori à son sujet, ce qui est toujours un bon point avant de démarrer une nouvelle lecture.
C'est un quiproquo qui m'a fait choisir cette lecture. D'habitude je ne me fie pas au quatrième de couverture, qui se révèle trop souvent de la publicité mensongère. Mais l'homme est faible par nature. 

Je pensais lire l'aventure de Monsieur Henri, le personnage principal de ce livre qui quitte sa maison pour partir à la découverte du Canada. Je ne sais pas pourquoi j'avais interprété ainsi le résumé du livre. En fait non, c'est faux, j'en ai une petite idée. Cette histoire-là me plaisait car elle faisait écho à un sujet assez proche et que j'ai en tête pour un prochain roman
Mais de Canada il n'est pas question et ce bouquin n'a rien d'un roman "sur la route". D'un point de vue narratif, il correspond même au genre de roman qui me laisse sur le bord de la route. Parce que les personnages ne sont pas assez incarnés à mon goût et qu'il n'y a pas la tension dramatique qui me parle. La déception vient surtout de ce quiproquo dans lequel l'auteur et même son roman n'ont aucune responsabilité.
Néanmoins il faut souligner ici la richesse lexicale et l'inventivité formelle de ce roman. En plus de constituer un véritable roman d'apprentissage, ce livre palpite de vocabulaire, à tel point qu'il faut garder une encyclopédie à proximité et se lancer dans l'exploration de celle-ci en même temps que le personnage principal se lance dans l'exploration du monde. L'emploi systématique du présent ajoute au côté contemplatif du récit, parfois peut-être un poil trop en apesanteur. Alors même si pour moi cette lecture relève plus de l'exercice de style que du roman tel que je l'apprécie, on ne peut que souligner le travail de l'auteur sur la langue.

mercredi 16 janvier 2019

L'extrait du... 15 janvier

"L'horreur, ce n'est pas la mort, mais la vie que mènent les gens avant de rendre leur dernier soupir. Ils n'ont aucune considération pour elle et ne cessent de lui pisser, de lui chier dessus. Des copulateurs sans conscience. Ils ne s'obsèdent que sur la baise, le cinoche, le fric, la famille, tout ce qui tourne autour du sexe. Sous leur crâne, on ne trouve que du coton. Ils gobent tout, Dieu comme la patrie, sans jamais se poser la moindre question. Mieux, ils ont vite oublié ce que penser voulait dire, préférant abandonner à d'autres le soin de le faire. Du coton, vous dis-je, plein le cerveau ! Ils respirent la laideur, parlent et se déplacent de manière tout aussi hideuse. Faites leur donc entendre de la bonne musique, eh bien ils se gratteront l'oreille. La majeure partie des morts l'étaient déjà de leur vivant. Le jour venu, ils n'ont pas senti la différence."

Charles Bukowski - Le capitaine est parti déjeuner

lundi 14 janvier 2019

L'extrait du... 14 janvier

L'extrait du jour n'est pas remarquable d'un point de vue stylistique ou même formel. Néanmoins il soulève des questions qui appellent à la discussion, comme c'est souvent le cas dans les romans de Houellebecq.
Cet extrait n'est pas récent, il date de son roman "La possibilité d'une île" publié en 2005.

"Aucune culture de l'esprit, n'avait pu se développer dans les sociétés à délinquance forte, simplement parce que la sécurité physique est la condition de la pensée libre, qu'aucune réflexion, aucune poésie, aucune pensée un tant soi peu créative n'a jamais pu naître chez un individu qui doit se préoccuper de sa survie, qui doit être constamment sur ses gardes."

jeudi 10 janvier 2019

L'extrait du... 10 janvier


"Qui, en face d'un immeuble parisien, n'a jamais pensé qu'il était indestructible? Une bombe, un incendie, un tremblement de terre peuvent certes l'abattre, mais sinon? Au regard d'un individu, d'une famille, ou même d'une dynastie, une ville, une rue, une maison, semblent inaltérables, inaccessibles au temps, aux accidents de la vie humaine, à tel point que l'on croit pouvoir confronter et opposer la fragilité de notre condition à l'invulnérabilité de la pierre. Mais la même fièvre qui, vers 1850, [...] a fait surgir de terre ces immeubles, s'acharnera désormais à les détruire.
Les démolisseurs viendront et leurs masses feront éclater les crépis et les carrelages, défonceront les cloisons, tordront les ferrures, disloqueront les poutres et les chevrons, arracheront les moellons et les pierres. [...]
Les bulldozers infatigables des niveleurs viendront charrier le reste: des tonnes et des tonnes de gravats et de poussières."

Georges Perec, La vie mode d'emploi.

mercredi 9 janvier 2019

Autopromo & Concours

Pour ceux qui sont fans du site de Jeff Bezos, après un délai inhabituellement long, je vous confirme que vous pouvez enfin y trouver mon dernier roman, en plus des autres.

Si vous ne voulez pas investir dans la version papier de "Après les parenthèses", vous pouvez toujours lire la version KOBO gratuitement sur KOBO. J'ai en effet décidé de participer à un concours organisé par la Fnac, Le Point et les éditions Préludes. En jeu : une publication chez un vrai éditeur. Pour m'aider, il suffit de télécharger le fichier Kobo gratuit sur le lien ci-dessus puis de mettre une petite note). 

Alors oui je sais c'est moche. L'autopromo c'est narcissique et c'est contraire à tous les messages de droiture que nous envoient les personnages publics que dégueulent nos écrans. Mais quand même, quand je vois qu'en une demi-journée le dernier Houellebecq s'est écoulé à plus d'exemplaires que ne le feront tous mes bouquins additionnés pendant les quinze siècles à venir, ça fait mal à mon petit palpitant rabougri. Enfin non, quand même pas, mais bon...

lundi 7 janvier 2019

L'extrait du ... 7 Janvier

Pour ce premier extrait de l'année 2019, place à Joris-Karl Huysmans, qui n'avait jusqu'à aujourd'hui, pas eu droit à la citation sur ces pages. Un oubli difficilement pardonnable.

Joris-Karl Huysmans, "Là-bas", 1891

"Et soudain les enfants de choeur agitèrent des sonnettes.  Ce fut comme un signal ; des femmes tombées sur les tapis se roulèrent. L’une sembla mue par un ressort, se jeta sur le ventre et rama l’air avec ses pieds ; une autre subitement atteinte d’un strabisme hideux, gloussa, puis, devenue aphone, resta, la mâchoire ouverte, la langue retroussée, la pointe dans le palais, an haut ; une autre, bouffie, livide, les pupilles dilatées, se renversa la tête sur les épaules puis la redressa d’un jet brusque, et se laboura en raclant la gorge avec ses ongles ; une autre encore, étendue sur les reins, défit ses jupes, sortit une panse nue, météorisée, énorme, puis se tordit en d’affreuses grimaces, tira, sans pouvoir la rentrer, une langue blanche déchirée sur les bords, d’une bouche en sang, herissée de dents rouges."

dimanche 6 janvier 2019

Concours 2019


J'ai décidé de participer au concours annuel lancé par les éditions Préludes en association avec Kobo et la Fnac. 

J'ai déposé la version de "Après les parenthèses" au format ePUB sur le site de Kobo ce matin. Sur cette version, j'ai modifié légèrement le titre en "Parenthèse retour" pour bien différencier les deux ebooks. J'ai par ailleurs retiré le premier du catalogue Kobo.
Donc, d'ici quelques jours, "Parenthèse retour" sera disponible sur la plateforme Kobo au prix de 0 €. 

Le règlement stipule qu'avant que les 5 finalistes soient départagés par "un jury professionnel", une première sélection sera faite sur le nombre de lectures et de commentaires laissés sur la plateforme KOBO. Je ne sais pas vraiment ce que cela signifie mais si vous voulez me soutenir, à la manière d'un de ces télé crochets à la con de chanteurs formatés qui singent Céline Dion ou un autre beugleur à la mode, vous en aurez l'opportunité. Je vous en dis plus dès que j'en sais plus...

samedi 5 janvier 2019

La citation du... 5 Janvier


Pour cette première citation de l'année 2019, j'ai choisi la voie d'un certain naturalisme emprunt de sagesse. Et venant d'un auteur qui fait du bien par où il passe, Sylvain Tesson.

"Natsume Soseki, dans ses odes au vagabondage, décrit l'homme parfait comme un bambou reposant sur les rives de l'Impassibilité, profitant du moindre souffle d'air sans être affecté par lui, jouissant du plus petit parfum de fleur sans en être transformé."

Sylvain Tesson, "Petit traité sur l'immensité du monde"

mardi 1 janvier 2019

2019, Michel et les autres

Nous voici en 2019. Dans trois jours, le monde de l'édition française va connaître un mini séisme médiatique avec la parution de "Sérotonine", le nouveau roman de Michel Houellebecq. Au-delà de toute considération formelle ou de tout avis stylistique sur ce bouquin, c'est surtout un nouveau coup de marketing auquel se livrent auteur, agent, et éditeur. Le plus triste dans tout cela c'est que pendant ce temps de bons bouquins paraissent sans avoir droit à un mot nulle part. 

Bon d'accord je suis de mauvaise foi, car j'aime beaucoup les bouquins de Houellebecq. Je ne suis pas tombé pour autant dans le côté obscur de ses admirateurs hystériques, sincères ou de circonstance, mais je l'avoue, j'aime ses bouquins. D'ailleurs j'ai occupé un moment de la nuit de la St Sylvestre à lire "La possibilité d'une île" son roman datant de 2005 qui s'immisce dans l'univers de la science fiction. Ah oui, et tant que j'y suis, je vous souhaite une très bonne année 2019 ! Pleine de lectures, d'orgasmes et de rock and roll.