Majoritairement connu pour son brillant "All the king's men" (traduit en France par les "Fous du roi") publié en 1946, il a également publié en 1961 "Wilderness", un titre bien plus évocateur que celui de "La grande forêt" qui a été choisi pour la traduction française. Qu'importe, ce bouquin est un grand bouquin dans la plus grande tradition des grands livres américains de la première moitié du XXème siècle.
Le destin d'un juif allemande affublé d'un pied-bot qui se rend en Amérique pour combattre pour les droits des noirs en pleine guerre de Sécession nous met en présence d'une galerie de personnages tous plus faillibles les uns que les autres. Que reste t-il de l'homme dans la boucherie de la guerre et l'absurdité de l'existence ? La guerre, la folie humaine et la démesure de la nature pour toute réponse...
Lu quelques jours après "Au cœur des ténèbres", ce bouquin présente une filiation évidente avec le chef d'oeuvre de Conrad.
Dans une autre guerre et un autre genre, le Bardamu du Voyage n'est jamais très loin, et si Warren est moins cynique que Céline, il n'est jamais dupe des travers de l'Homme.
C'est beau, c'est grand, c'est tout ce que l'on aime dans la littérature américaine et tout ce qu'on aimerait trouver de nos jours dans les bouquins écrits par les auteurs contemporains qui bavent leur jus de chique et puis font des ronds de jambes devant les critiques masturbateurs de pines rabougries, tellement loin de l'ambition et du vertige que nous offrent les véritables écrivains tels que Robert Penn Warren.
Extrait (et début du bouquin) :
Si la montagne n'avait pas étincelé d'un éclat aussi blanc.
Si là-bas, au-dessous des blancs sommets, la ligne irrégulière des forêts de sapins n'avait pas paru d'un bleu aussi noir.
Si le ciel, au-dessus des miroitements neigeux du Zelzsteinberg, n'avait pas été d'un bleu tout neuf, déchirant d'innocence. Si un léger nuage, tel un flocon de crème fouettée, n'avait pas flâné très haut dans ce bleu purifié, éblouissant. Si l'univers n'avait pas été d'une beauté absolue.
Si aucune de ces choses n'avait été ce qu'elles étaient, lui, Adam Rosenzweig, aurait pu se réfugier en son moi profond, dans les paradoxes de l'Histoire et de la connaissance, dans cette sagesse qui est résignation.
Si la montagne n'avait pas étincelé d'un éclat aussi blanc.
Si là-bas, au-dessous des blancs sommets, la ligne irrégulière des forêts de sapins n'avait pas paru d'un bleu aussi noir.
Si le ciel, au-dessus des miroitements neigeux du Zelzsteinberg, n'avait pas été d'un bleu tout neuf, déchirant d'innocence. Si un léger nuage, tel un flocon de crème fouettée, n'avait pas flâné très haut dans ce bleu purifié, éblouissant. Si l'univers n'avait pas été d'une beauté absolue.
Si aucune de ces choses n'avait été ce qu'elles étaient, lui, Adam Rosenzweig, aurait pu se réfugier en son moi profond, dans les paradoxes de l'Histoire et de la connaissance, dans cette sagesse qui est résignation.
Robert Penn Warren - La grande forêt (Points)
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