lectures, écritures, avis, combats perdus d'avance et instantanés périmés, morts-nés et autres occlusions de conscience en attendant la suite.
mardi 30 juin 2020
Journapalm 325
lundi 29 juin 2020
Journapalm 324
dimanche 28 juin 2020
L'extrait du... 28 juin
Emmanuel Carrère - Limonov (POL)
Journapalm 323
- Quelle heure est-il ?
- Sept heures.
Elle s’est tournée de l’autre côté, vers le mur qui dans l’obscurité de sept heures du matin n’existait pas. Alors il a quitté la chambre en pensant à ces mots échangés avec elle, les premiers depuis vingt-quatre heures, un peu désarçonné en réalisant qu’ils étaient déjà de trop.
samedi 27 juin 2020
Journapalm 322
vendredi 26 juin 2020
Journapalm 321
Drame de l’immortalité
Habitué à câliner son chat chaque matin avant de partir au
bureau, un homme caresse depuis une semaine un chat mort de vieillesse sur
le canapé de son salon.
C’est l’odeur nauséabonde qui a attiré l’attention des voisins.
jeudi 25 juin 2020
Journapalm 320
mercredi 24 juin 2020
Journapalm 319
Il
a dix ans et il dort dans une chambre d’hôtel mal insonorisée sur la route
côtière reliant Menton à Vintimille. Toute la nuit, le spectacle son et
lumière des moteurs et des phares qui se découpent dans les interstices métalliques des
persiennes. Sa première expérience de nuit blanche et de sensation de vague
soulagement le matin : le début d’une imposante collection.
mardi 23 juin 2020
L'extrait du... 23 juin
Eric Plamondon - 1984 Hongrie Hollywood Express
(Le Quartanier)
Journapalm 318
Et puis… les steaks
étaient-ils mauvais ? On a mis un panneau « à vendre » et le vaisseau
spatial est devenu du béton qui vieillit. Maintenant en bordure d’autoroute,
il y a un mât surmonté d’un M jaune qui signale un bâtiment familier où l’on
sert les mêmes hamburgers que partout ailleurs.
lundi 22 juin 2020
L'extrait du... 22 juin
"Les rues étaient de plus en plus sinistres. Le quartier était plein de camés, même avec cette neige et cette gadoue, à la recherche de quelque chose, n'importe quoi. Les halls d'entrée étaient envahis de visages maladifs, avec des nez qui coulaient, de corps tremblant de froid, en état de manque, dont la moelle gelée craquait dans leurs os quand les camés se mettaient à suer. Les bâtiments déserts qui s'étendaient sur des kilomètres et conféraient à la ville cet air de champ de bataille de la Seconde Guerre mondiale, cet aspect pathétique et dévasté qu'on retrouvait glacé sur le visage de ses habitants, étaient semés de petits feux entretenus par des êtres tremblants qui tentaient de se réchauffer et de survivre assez longtemps pour dégoter de la came, d'une façon ou d'une autre, de durer un jour de plus pour pouvoir recommencer le lendemain."
Hubert Selby JR - Retour à Brooklyn
(10/18 - Trad.Daniel Mauroc)
Journapalm 317
La course folle durait depuis dix minutes lorsque le cheval parvint à l’extrémité de la jetée. Là, dans un tumulte de feu et de lave, l’animal sauta dans le port et disparut dans l’eau où le corps minuscule de l’enfant dessina une ultime virgule d’écume à la surface du monde.
dimanche 21 juin 2020
Journapalm 316
De nuit, les flocons de neige apparaissent mollement dans la lueur des phares.
Il roule sur cette route nationale déserte et qui n’en finit plus de filer droit. Comme toujours il est seul, ou presque. Sur le siège passager il a déposé un aquarium boule rempli d’eau à l’intérieur duquel tourne un poisson rouge qui a le mal des transports.
samedi 20 juin 2020
Journapalm 315
vendredi 19 juin 2020
L'extrait du... 19 juin
"Cette dentelle de granit qui nous soutenait en l’air était polie, rongée par les vents et les pluies de quatre cents hivers. Elle était d’un gris foncé à reflets roses ; il y avait dessus, par plaques, ce lichen jaune, cette mousse du granit qui met des siècles à pousser et qui jette ses tons dorés sur toutes les vieilles églises bretonnes. Les gargouilles à laide figure, les petits monstres aux traits vagues, qui vivent là-haut dans l’air, grimaçaient à côté de nous au soleil, comme gênés d’être regardés de si près, comme s’étonnant en eux-mêmes d’être si vieux, d’avoir essuyé tant de tempêtes et de se retrouver en pleine lumière. C’était ce monde-là qui avait présidé de haut à la naissance d’Yves ; c’était ce monde aussi qui de loin nous regardait avec bienveillance passer sur la mer, quand nous ne distinguions, nous, qu’une indécise flèche noire. Et nous faisions connaissance avec lui."
Pierre Loti - Mon frère Yves
(Folio)
Journapalm 314
Lorsque sa femme, modèle de tous ses lamentables poèmes, le quitta en lui annonçant qu’elle le trompait avec plusieurs autres hommes depuis des années, il rata son suicide. La nuit suivante, cuvant ses verres de gin, il décida dans un grotesque éclair de conscience que sa muse lui ayant fait des cornes, il allait apprendre à jouer de la cornemuse.
Six mois plus tard, son voisin exténué l’abattit d’un coup de fusil.
jeudi 18 juin 2020
Journapalm 313
Trois mois plus tard, débarquant sur les rives de la Neva, il regarde le soleil couchant puis entre dans une taverne où des marins l’initient au Zapoï.
Deux jours de beuverie plus tard, il se réveille dans une forêt de bouleaux près de Vyborg, plein Nord, déguisé en babouchka, un fichu sur la tête imprégné de vomi.
mercredi 17 juin 2020
L'extrait du... 17 juin
"Mon destin serait la solitude, la drogue, la violence et le suicide...
Ecrire, c'est comme se droguer, on commence par pur plaisir et on finit par organiser sa vie comme les drogués en faisant tout tourner autour de son vice.
La littérature nous permet de comprendre la vie...
Elle nous parle de ce qu'elle peut être, mais aussi de ce qu'elle a pu être."
Enrique Vila-Matas - Le mal de Montano
(10/18 - Trad.André Gabastou)
Journapalm 312
Un soir, après sept nuits consécutives sans parvenir à dormir, rempli de folie et de terreur, il avala de la poudre insecticide diluée dans un verre de JB. Au matin, il s’était transformé en fourmilier et sa trompe le démangeait.
mardi 16 juin 2020
L'extrait du... 16 juin
"À cette époque, le château de Dundonald, refuge de tous les lutins errants de la contrée, était voué au plus complet abandon. On allait peu le visiter sur le haut du rocher qu'il occupait au-dessus de la mer, à deux milles de la ville. Peut-être quelques étrangers avaient-ils encore l'idée d'interroger ces vieux restes historiques, mais alors ils s'y rendaient seuls. Les habitants d'Irvine ne les y eussent point conduits, à quelque prix que ce fût. En effet, quelques histoires couraient sur le compte de certaines "Dames de feu" qui hantaient le vieux château.
Les plus superstitieux affirmaient avoir vu, de leurs yeux vu, ces fantastiques créatures. Naturellement, Jack Ryan était de ces derniers. La vérité est que, de temps à autre, de longues flammes apparaissaient, tantôt sur un pan de mur à demi éboulé, tantôt au sommet de la tour qui domine l'ensemble des ruines de Dundonald-Castle.
Ces flammes avaient-elles forme humaine, comme on l'assurait ? Méritaient-elles le nom de "Dames de feu" que leur avaient donné les Écossais du littoral ? Ce n'était évidemment là qu'une illusion de cerveaux portés à la crédulité, et la science eût expliqué physiquement ce phénomène."
Les plus superstitieux affirmaient avoir vu, de leurs yeux vu, ces fantastiques créatures. Naturellement, Jack Ryan était de ces derniers. La vérité est que, de temps à autre, de longues flammes apparaissaient, tantôt sur un pan de mur à demi éboulé, tantôt au sommet de la tour qui domine l'ensemble des ruines de Dundonald-Castle.
Ces flammes avaient-elles forme humaine, comme on l'assurait ? Méritaient-elles le nom de "Dames de feu" que leur avaient donné les Écossais du littoral ? Ce n'était évidemment là qu'une illusion de cerveaux portés à la crédulité, et la science eût expliqué physiquement ce phénomène."
Jules Verne - Les Indes noires
(Livre de Poche)
Journapalm 311
lundi 15 juin 2020
L'extrait du... 15 juin
"Il détourna les yeux avec effort, et l'instant d'après les fixa de nouveau sur la morte. Elle s'était levée. Elle s'avance lentement vers lui, les yeux fermés, et en étendant les bras comme si elle voulait saisir quelqu'un. Elle va droit à lui. Tout éperdu, il se hâte de tracer du doigt un cercle autour de sa place, et se met à lire avec effort des prières d'exorcisme que lui avait enseignées un vieux moine qui avait souvent vu, dans sa vie, des sorciers et des esprits malins. La morte s'avança jusqu'à la trace de son cercle ; mais on voyait qu'elle n'avait pas la force de franchir cette limite invisible. Elle devint tout à coup bleue et livide comme le cadavre d'une personne morte depuis quelques jours ; ses traits étaient hideux; elle fit claquer ses dents les unes contre les autres, et ouvrit ses yeux morts. Mais elle ne vit rien ; car tout son visage trembla de colère, et elle se dirigea d'un autre côté, tout en étendant les bras et tâtant les murailles, comme pour tâcher de saisir Thomas. Elle s'arrêta enfin, menaça du doigt, et se recoucha dans son cercueil."
Nikolai Gogol - Vij
(Actes Sud / Trad.Louis Viardot)
Journapalm 310
dimanche 14 juin 2020
Journapalm 309
Soixante ans plus tard, depuis le perron de sa maison, elle observait la plaine bordée de forêts de sequoias : tout le reste avait disparu depuis longtemps. Soudain elle aperçut un groupe de cavaliers à environ un kilomètre dans la prairie, et pendant un instant elle se sentit profondément heureuse.
samedi 13 juin 2020
Journapalm 308
Arrivée à Hobart, elle a emprunté la C616 goudronnée pour rejoindre le sommet du mont Wellington. Là-haut : des nuées de camping-cars sur le parking, des nuages bas masquant la vue sur la baie et des gosses qui se couraient après, mais aucun diable de Tasmanie. Alors elle a fait demi-tour.
vendredi 12 juin 2020
L'extrait du... 12 juin
"Je me séchai, enfilai un caleçon et entrai dans la cuisine. Elle était devant la cuisinière, le dos tourné, en train de préparer mon petit déjeuner. L’expert des appendices charnus que je suis détecta aussitôt la contraction de ses fessiers – signe indubitable de fureur chez une femme. L’expérience m’a appris à me montrer extrêmement prudent en présence d’une métamorphose aussi spectaculaire des fessiers féminins, si bien que je m’assis sans moufter."
John Fante - Rêves de Bunker Hill
(Trad.Brice Matthieussent)
Journapalm 307
jeudi 11 juin 2020
Journapalm 306
Ce matin en buvant son café au lait accoudée à son balcon, elle remarque des mouvements dans les frênes en bordure du parking. Regardant avec davantage d’attention elle distingue plusieurs chimpanzés et deux orangs outangs qui remontent vers la cime des arbres. Quand l’un d’eux s’immobilise et se met à la regarder fixement.
mercredi 10 juin 2020
L'extrait du... 10 juin
"Ouvrir un gros livre et s'enfoncer dedans! La jungle sur une page, un fleuve impétueux de l'autre côté. Personne ne peut vous atteindre sur l'étroite corniche entre le Point et la Lettre Majuscule. Comme un cloporte il peut se glisser entre le papier et le mot, rester immobile, parfois jeter un coup d’œil un peu plus loin. Il peut chatouiller le dos des mots et lui seul les entendre rire. Il peut errer dans la forêt des mots où les jeux de lumière sont si beaux et, à chaque tournant du texte, découvrir du nouveau: des mots comme des arcades, comme des feuillages d'arbres, comme des corps ou des flammes. D'étranges animaux circulent, poussant des cris qui lui sont inconnus. Il y a là des villes secrètes, des villages, de curieuses embarcations et des gens qui discutent en un tas de langages."
Göran Tunström - L'oratorio de Noël
(Actes Sud / Trad.: Lena Grumbach)
Journapalm 305
mardi 9 juin 2020
L'extrait du... 9 juin
"Seule, Mme Carruter a survécu.
Elle mesure un mètre soixante-deux. Elle pèse cent quarante-six kilos. Elle est
faite d’un sac, de poussière et de plâtre. Elle a des seins énormes,
pendentifs, et remplis de limaille de fer. Elle arrive au son de l’hymne américain.
Elle chaloupe atroce sur fond de bannières étoilées. Elle arrache avec une
fantastique lenteur le péplum emplumé qui la recouvre, et démontre, sublime,
des outres vergetées. On la siffle (hourrah !) et les jeunes managers qui
la contemplent, athlètes-bisnessmen, aux énormes épaules, au crâne étroit, sans
front, diplômés de Harvard, et qui valent déjà deux cent mille dollars,
tremblent de tous leurs membres et répandent pour elle leur semence glacée, tandis
que franchissant la rampe, toute nue, énorme flaque rose, elle vient et répand
à son tour ses mystères sur eux, car elle est l’Amérique, la Matrice vivante,
la Mère nourricière, la Truie indestructible, qui les garde."
Pierre Bourgeade - New York Party (Gallimard)
Journapalm 304
Il marchait dans la rue, prenait le métro, déambulait dans les centres commerciaux et on le payait pour cela. Jusqu’au jour où un commerçant local indigné par sa promotion d’un géant de la distribution concurrent mit le feu à la planche. Brûlé vif, il mourut dans d’atroces souffrances.
lundi 8 juin 2020
Journapalm 303
Quand il sort de l’hôtel à la nuit tombée, aucune course poursuite ni bruit de moteur enragé dans les rues de San Francisco. Des voitures coréennes, des véhicules électriques discrètes… Et les silhouettes avachies contre les murs lépreux qui enfoncent des seringues dans des bras à peine adultes. Bullitt ne lui a jamais paru aussi loin.
dimanche 7 juin 2020
Journapalm 302
Alors, tournant la tête vers elle aussi lentement que l’aurait fait une tortue neurasthénique ayant croqué deux comprimés de Xanax (l’une de ses suppositions étant néanmoins réelle), sa mère a bougé ses lèvres comme elle en avait l’habitude avant une grande déclaration. Mais elle a simplement répondu « tu nous emmerdes, retourne faire tes devoirs ».
samedi 6 juin 2020
Journapalm 301
vendredi 5 juin 2020
Journapalm 300
jeudi 4 juin 2020
L'extrait du... 4 juin
VVitres de son où virent les astres,
Verres où cuisent les cerveaux,
Le ciel fourmillant d’impudeurs
Dévore la nudité des astres.
Un lait bizarre et véhément
Fourmille au fond du firmament ;
Un escargot monte et dérange
La placidité des nuages.
Délices et rages, le ciel entier
Lance sur nous comme un nuage
Un tourbillon d’ailes sauvages
Torrentielles d’obscénités.
Antonin Artaud - L'Ombilic des limbes (Gallimard)
Journapalm 299
La mescaline lui fait toujours cet effet le jour d’après. Parfois il retrouve même des bouts épars de son propre corps au petit bonheur sur le goudron.
Aujourd’hui toutefois ce n’est pas le cas, il a repris conscience au milieu d’un terrain de football qui recouvre tout le pays. Levant la tête il aperçoit un zeppelin sur les flancs duquel il lit en caractères gigantesques « Du peyotl et des jeux ».
mercredi 3 juin 2020
L'extrait du... 3 juin
Les grandes blondes conquérantes prennent le soleil, l’absorbent, l’assimilent puis l’arborent. Sous forme de pigments. Ainsi, les soirs d’été, dans les night-clubs, croisant leurs jambes interminables sur de hauts tabourets, rayonnent-elles comme des soleils portatifs. Le soleil est lui-même une grande blonde."
Journapalm 298
L’évasion est parfaite. Demain peut-être, aux premières lueurs du jour, les adultes découvriront les empreintes de ses pieds dans la vase éternelle. Mais alors l’enfant sera déjà loin.
mardi 2 juin 2020
Journapalm 297
Accoudé à son balcon encore humide de nuit, il contemple les environs de son existence en liberté conditionnelle, immunisée du bruit des voitures.
Quand ces derniers enflent à nouveau, pas besoin de montre : il sait qu’il est temps de se dissoudre dans une tranche supplémentaire de quotidien.
lundi 1 juin 2020
Journapalm 296
Là, dans le chaos des boites rectangulaires de différentes tailles et couleurs éparpillées sur le sol, il trouvait assez rapidement les médicaments cherchés. Les mettant de côté, il remettait alors les autres à l’intérieur du meuble, sans aucun ordre ni classement, dans une sorte de Légo anarchique, pour une prochaine auto médicamentation.
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