mardi 28 mai 2019

L'extrait du... 28 mai


"Il en va des librairies comme du whisky : ce sont des passions auxquelles il vaut mieux s'adonner seul. Pendant qu'on boit un single malt de quarante ans d'âge, ce serait dommage de se déconcentrer en bavardant avec quelqu'un". 

François Weyergans - Franz et François (Grasset)

vendredi 24 mai 2019

Nouveau projet

En attendant de recevoir le bon à tirer de "Cirque de masques et d'échasses" le recueil de nouvelles qui sera publié début juin, j'ai démarré un nouveau projet ce jeudi soir. Quatre pages écrites, sûrement une longue nouvelle qui démarre.

Voici un indice du sujet de cette novella.


jeudi 23 mai 2019

BAT... Men !


Deux heures de mise en page nocturnes plus tard, le bon à tirer (BAT) est parti en édition... D'ici une petite semaine, il devrait être disponible sur le site. 

mercredi 22 mai 2019

L'extrait du... 23 mai

"Il pense que tu es Dieu jusqu’à trois ans. Ensuite, il pense qu’il veut coucher avec toi jusqu’à douze ans. Ensuite, il pense que tu es de la merde jusqu’à vingt ans. Ensuite, il devient pédé ou autre et il se sent coupable envers toi jusqu’à soixante ans et jusqu’à ce qu’il devienne aussi vieux et merdique que toi. C’est le programme, non ?"

Martin Amis, "D'autres gens" (10/18)

jeudi 16 mai 2019

L'extrait du... 16 mai

"Nous sommes tous des raconteurs. Couchés sur le dos, nous levons les yeux vers le ciel étoilé. C'est là qu'ont commencé les histoires, sous l'égide de cette multitude d'astres, qui, la nuit, fauchent les certitudes, et, avec un peu de chance, vous les rendent le matin sous forme de foi...

Ce qui nous sépare des personnages sur lesquels nous écrivons n'est pas notre savoir, qu'il soit objectif ou subjectif,mais leur expérience du temps au sein de l'histoire que nous racontons. Ce fossé nous octroie, à nous autres raconteurs,le pouvoir de connaître le tout. Mais, par la même occasion, ce fossé nous rend impuissants: une fois le récit engagé, nous ne pouvons plus contrôler nos personnages. Nous sommes contraints de les suivre à travers et en travers de ce temps qu'ils éprouvent, et que nous dominons. Le temps et, par là, l'histoire leur appartiennent. 

Mais le sens de l'histoire, ce pourquoi elle vaut la peine d'être narrée, ce qui nous inspire, c'est nous, les raconteurs, qui en possédons les aboutissants, car nous nous situons du côté de l'intemporel. C'est comme si ceux qui nous lisent ou nous écoutent voyaient tout à travers une loupe. Cette lentille- le secret de toute narration- nous l'ajustons, nous la mettons au point avec chaque nouvelle histoire. Si je dis que nous autres raconteurs, sommes les Secrétaires de la Mort, c'est que, l'espace de nos vies fugitives, pour chacune de nos histoires, nous avons à polir ces lentilles entre le sable du temporel et la pierre de l'intemporel."
John Berger - Un métier idéal 
(L'Olivier, traduction : Michel Lederer)

mardi 14 mai 2019

L'extrait du... 14 mai

"J’ai quitté la route en arrivant devant le magasin de Roy Whitmire, pour aller me garer à côté du panneau annonçant DERNIÈRE POMPE À ESSENCE AVANT TRENTE KILOMÈTRES. Je suis passé devant des types assis sur des caisses de Cheerwine et de Double Cola. Avec leurs crânes chauves et leurs cous ridés, ils ressemblaient à des tortues d’eau se chauffant au soleil sur des souches. Les types m’ont salué d’un signe de tête familier, mais la canicule les avait vidés de tout bavardage. J’ai farfouillé dans la glacière installée sur la galerie, les doigts engourdis par l’eau et la glace, avant de tomber enfin sur une petite bouteille. Je n’avais pas soif, mais il n’était pas convenable de ne rien acheter. Je suis entré dans une vaste pièce, plus sombre que l’extérieur, mais pas plus fraîche.

La boutique n’avait guère changé, la première étagère était chargée de toutes sortes d’articles allant des hameçons Eagle Claw aux poudres contre les maux de tête Goody, et sur le comptoir se trouvait un grand bocal où nageaient dans une saumure trouble des oeufs durs plaqués contre la paroi de verre tels d’énormes yeux. Près de la caisse enregistreuse, un autre bocal, celui-ci rempli de rubans de réglisse.
— Ça va-t-y, étranger ? a lancé Roy, en sortant de derrière le comptoir pour me serrer la main."

Ron Rash, "Un pied au paradis
(Folio, traduction Isabelle Reinharez)

jeudi 9 mai 2019

En approche...

Il est en approche... 

Parce qu'il ne sera pas dit que je ne publierai pas un livre cette année ! 

Je suis actuellement en train de finaliser une dernière relecture corrective du petit dernier. Mais ce ne sera pas un roman. 

"Cirque de masques et d'échasses" sera disponible en livre papier et en ebook à la fin du mois de mai. 

Il s'agit d'un recueil de six nouvelles écrites entre l'hiver 2017 et le printemps 2019.

Je vous en dis plus dès que le Bon à Tirer sera entre mes mains... Si certains sont intéressés je pourrais faire une commande groupée.


mardi 7 mai 2019

L'extrait du ... 7 mai

"J’ai débouché la bouteille et l’ai brandie devant moi. « Saluti ! » Et je me suis envoyé une rasade. J’ignorais pourquoi j’avais acheté cet alcool. C’était la première fois de ma vie que je dépensais de l’argent pour de la gnôle. Je détestais le goût du whisky. J’ai été surpris de le trouver dans ma bouche, mais il était bel et bien là, et avant que je n’aie le temps de réagir, l’alcool me travaillait, griffant mes dents et attaquant ma gorge – il se débattait et lacérait comme un chat qui se noie. Son goût était horrible, comme de poils roussis. Je l’ai senti descendre, me faire des trucs bizarres dans l’estomac. Je me suis léché les babines.
« Merveilleux ! Tu as raison. Ce whisky est merveilleux ! »
Il s’était niché au creux de mon estomac où il roulait en tous sens en essayant de trouver une place confortable, et je me frottais vigoureusement le ventre pour que la brûlure de ma peau égale celle de mon estomac.
« Splendide ! Superbe ! Extraordinaire ! »"

John Fante - La route de Los Angeles 
(10/18, traduction Brice Matthieussent)

lundi 6 mai 2019

Lecture : Jean-Louis Fournier - Veuf

Si Jean-Louis Fournier s'est fait connaître du très grand public avec "Où on va papa" publié en 2008, bien avant, il avait mis son talent de réalisateur au service d'un certain Pierre Desproges. Touche à tout talentueux, Fournier met une grande énergie dans ses livres, autant dans le fond que dans le rythme de publication (10 parutions entre 2010 et 2018). 

"Veuf" est un récit autobiographique publié en 2011. Je n'aime pas les récits autobiographiques. Mais j'ai énormément apprécié celui-ci. "Veuf" évoque le souvenir et la douleur de la perte de l'être aimée. Je rechigne à lire les livres qui parlent d'un être aimé. Mais j'ai dévoré celui-ci. Certains auteurs ont un talent pour parler de choses tristes sans verser dans le larmoyant, de choses graves sans tomber dans l'apitoiement. Ils sont rares. Ce petit bouquin est une pépite qui rassemble des pensées, des idées, sans prétention mais terriblement bien dites, sur le sentiment qu'il reste après la mort de l'être aimé. 

En invoquant le passé lointain, en se souvenant de grands moments, en parlant de petits tracas du quotidien, Fournier ne glorifie rien, ni personne. Il dit juste sa douleur de devoir vivre sans celle qui a très longtemps partagé sa vie. Il ne cherche pas les effets, les grands mots, préférant les résurgences de petits détails. Et il sonne diablement juste. Avec des petits riens, avec des insignifiances bourrées de vérité, il trace des lignes belles qui honorent la mémoire d'une femme et d'un couple qui n'en est plus un. Ce n'est jamais triste mais on ne peut s'empêcher de ressentir une profonde empathie pour celui qui écrit, une grande complicité avec celui qui reste.
Lorgnant parfois du côté de l'aphorisme, cet enchaînement de pensées, d'idées, de souvenirs constitue un ensemble où presque rien n'est à jeter; malgré parfois quelques répétitions. Et qui a touché l'amateur de Brautigan que je suis pour certaines formules qui m'ont rappelé les images poétiques et vibrantes de l'auteur américain. 

Extrait
"Quand je regarde tes petits chapeaux, je pense avec une infinie tristesse à ton cerveau, tombé en panne sèche, de sang.
Il est éteint définitivement.
Tu ne penseras plus jamais à moi.
J'ai regardé à l'intérieur des chapeaux s'il ne restait pas une petite pensée pour moi."



vendredi 3 mai 2019

L'extrait du... 3 mai

"Je me rendais compte, grâce à plusieurs expériences similaires, que Wilmot devait être le genre d'homme capable de faire face aux maladies les plus graves, et même incurables, avec équanimité sans cesser de se plaindre de petits soucis -ses hémorroïdes, son eczéma, ses yeux trop secs, -parce que c'était des signes que la vie continuait."


Thomas McGuane - Sur les jantes 
(Bourgois, traduction Marc Amfreville)