jeudi 14 février 2019

Lecture : Jon Bassoff - Corrosion

Attention, voilà un auteur ! Jon Bassoff est écrivain, éditeur chez New Pulp Press, et New-Yorkais en exil dans le Colorado. Accessoirement il semble attiré par les personnages psychologiquement atteints, comme en témoignent ce premier roman mais aussi le suivant, qui semble dans la même veine. 
"Corrosion" porte drôlement bien son nom. Voilà un univers noir, noir jusqu'à la disparition de toutes les couleurs, jusqu'à l'effacement de toutes les nuances. 
Le thème ? Un homme, le visage défiguré, débarque dans une ville et vient en aide à une femme qui se fait agresser dans un bar. Rapidement on apprend que ce type est un vétéran de la guerre en Irak... à moins que les choses ne soient pas aussi simples. La suite ? il vous faudra la lire, je vous garantis que vous ne serez pas déçus ! 

Bassoff a manifestement bien verrouillé les choses lorsqu'il a construit cette histoire. Il démontre un véritable talent de conteur dans ce roman découpé en parties bien distinctes mais qui apportent un changement de ton salvateur pour l'intérêt du livre. On est pris dans le récit sans parvenir à lâcher le bouquin. Et le personnage principal qui est également le narrateur reste insaisissable, incontrôlable jusqu'à la dernière page. Mieux, il échappe certes aux autres personnages mais il échappe surtout au lecteur. Car on se demande à chaque page jusqu'où l'escalade va le mener, jusqu'où la corrosion va se propager.

Extrait : 
"Cette nuit-là, j’étais allongé dans mon lit, les ressorts Bonnell s’enfonçaient dans ma peau, et je fixais le plafond moisi. Il y avait une longue fissure en dents de scie. Je l’observais s’agrandir. Des gouttes d’eau tombaient de la fissure dans un pot rouillé. Goutte, goutte, goutte. Torture chinoise. À travers de minces fentes, je regardais par la fenêtre. La lune avait la couleur de la jaunisse.
Je n’arrivais pas du tout à dormir. Les souris et les rats avaient pris le contrôle de la maison. Je les entendais détaler sur le parquet, escalader les murs, ronger les meubles. Et puis j’entendis quelque chose d’autre. L’écho lointain de bruits de pas sur le trottoir en bas. Je sortis du lit et m’approchai de la fenêtre pour observer. Un homme marchait lentement dans la rue, juste à l’écart de la lumière des lampadaires. Il portait un costume en lambeaux, une cravate bleue pendant de son cou comme un nœud coulant. Il avait des cheveux gris acier, salement ébouriffés, un corps squelettique et un visage hanté, émacié. Quand il vit ma silhouette, il s’immobilisa et me dévisagea. Je me mis à trembler involontairement. Un sourire dément s’afficha lentement sur son visage. Je fis un ou deux pas en arrière, la respiration bloquée dans la trachée."

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