Callan Wink cumule les qualités de pêcheur et d’écrivain.
Lorsqu’on ajoute qu’il vit dans le Montana, on pense à tout de suite à Jim
Harrison et Thomas McGuane. La sortie de son livre « Courir au clair de lune avec un chien volé » en poche s’est d’ailleurs accompagné d’une mention
commerciale vantant cette comparaison : « Héros cabossés et grands espaces : le fils spirituel de Jim
Harrison est né. » Verdict Télérama. J’ai toujours un peu de mal avec
ces bandeaux et ces mentions visant à attirer l’œil du potentiel acheteur. C’est
la même chose avec un quatrième de couverture citant l’avis d’un chroniqueur, d’une
rédaction ou d’un journaliste sur le bouquin que l’on tient dans ses mains. Je
n’ai rien à cirer de leur avis et je ne veux pas qu’on me force la main quand
je me promène en librairie pour choisir des bouquins.
En l’occurrence, outre le fait d’être un excellent
titre, « Courir au clair de lune avec un chien volé » n’a pas volé la
mention élogieuse de Télérama. Et pourtant je suis intraitable quand il s’agit
de comparer un auteur à Big Jim. Mais il faut reconnaître que dans ce recueil
de nouvelles Callan Wink déploie une large palette de talents qui appelle à de
grandes promesses. Personnages intéressants, histoires de l’ouest moderne à la
fois fortes et sauvages, destins brisés dans leur élan, ou comment écrire de
belles intrigues avec trois fois rien. En un seul recueil de nouvelles, le jeune
Callan Wink (35 ans) réussit l’exploit de se positionner en héritier évident d’une
tradition littéraire des grands espaces et des grands destins que nous avons plus de difficultés à créer en Europe (exception faite de la littérature des pays de l'Est). Il va maintenant falloir assurer la suite, car on l’attend
au tournant.
Extrait :
"Peu après l’aube, elle vit depuis sa véranda six vautours qui, portés par un courant ascendant, les ailes déployées, planaient en décrivant des cercles. Les corbeaux et les corneilles aussi étaient venus. Elle les entendait, un vol noir qui piquait vers la ravine, sombre comme du marc de café répandu sur l’herbe sèche. Elle songea qu’elle aurait peut-être dû recouvrir la carcasse de terre, mais c’était sans doute mieux comme ça. Des funérailles bouddhistes – elle avait entendu dire que c’était ainsi que le Tibétains procédaient.
La veille encore, le spectacle des oiseaux dévorant son bœuf l’aurait anéantie, mais aujourd’hui, les choses se présentaient mieux. Un projet, c’était ce dont les gens avaient réellement besoin pour aller de l’avant."
La veille encore, le spectacle des oiseaux dévorant son bœuf l’aurait anéantie, mais aujourd’hui, les choses se présentaient mieux. Un projet, c’était ce dont les gens avaient réellement besoin pour aller de l’avant."
(Albin Michel / Traduit par Michel Lederer)
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