4ème de couverture : "Michael Beard a atteint une cinquantaine plus que mûre. Il est chauve, rondouillard, dénué de toute séduction et, au moral, il ne vaut guère mieux. Mais il a dans le temps obtenu le prix Nobel de physique ; depuis lors il se repose sur ses lauriers et recycle indéfiniment la même conférence, se faisant payer des honoraires exorbitants. En même temps, il soutient sans trop y croire un projet gouvernemental à propos du réchauffement climatique. Quant à sa vie privée, elle aussi laisse à désirer. En coureur de jupons invétéré, Beard voit sa cinquième femme lui échapper. Alors qu'il ne croyait plus se soucier d'elle, le voilà dévoré de jalousie.
Bientôt, à la faveur d'un accident, il pense trouver le moyen de surmonter ses ennuis, relancer sa carrière, tout en sauvant la planète d'un désastre climatique. Il va repartir de par le monde, à commencer par le pôle Nord…"
Ian McEwan est sans nul doute mon écrivain britannique contemporain favori. Je ne rechigne pas à passer un moment de lecture avec Julian Barnes (récemment encore) ou avec Jonathan Coe. Jadis, lorsqu’à vingt ans je découvrais la littérature, j’ai aimé David Lodge. Autrefois je ne crachais pas sur un Nick Hornby mais ses univers doux amer qui finissent chaque fois en adaptations ciné avec Hugh Grant ont fini par me sortir par les yeux (même si les romans sont bien meilleurs que les susdites adaptations sur grand écran). Je n’ai pas vraiment pris le temps d’aimer l’oeuvre de Martin Amis ou de découvrir celle de William Boyd. Alors, lorsqu’il s’agit de lire un auteur britannique d’aujourd’hui, mon goût personnel me porte vers Ian McEwan. Surtout depuis qu’il a ajouté à son large arc de compétences une nouvelle audace dans l’humour, parfois burlesque, qui fait tout le sel de toutes ses dernières productions. D’ailleurs hier encore au cours d’une pérégrination pascale à Chamonix, j’ai failli emporter (après m'être acquitté de son paiement bien sûr :)) son dernier roman dans la librairie Jean LANDRU (je recommande) de laquelle je suis finalement ressorti avec sous le bras un Jim Harrison (mon péché mignon), un David Vann et le dernier Tanguy Viel chez Minuit, encensé par toutes les critiques françaises, mais sans le dernier opus de McEwan, « Dans une coquille de noix » paru chez Gallimard (titre original « Nutshell » comme le splendide morceau éponyme d’Alice in Chains mais c’est une autre histoire, ne nous égarons pas et refermons les parenthèses, parsembleu !)
Or donc, Ian McEwan a écrit 14 romans entre 1978 et 2016 ainsi qu’une ribambelle de nouvelles qui ont révélé son goût pour l’énigme et une certaine forme d’humour grinçant dans la veine de la tradition britannique. Mais ce que j’aime chez cet auteur, c’est avant tout son style. Clair, lumineux par moments, le lecteur est tout de suite capté par cette voix qui nous guide et nous installe à notre aise dans un fauteuil club au coin du feu. SOLAIRE est un excellent bouquin écrit en 2011 et qui aborde des thèmes modernes au cœur de nos sociétés occidentales : le nucléaire, le réchauffement climatique, et bien sûr le destin de quelques personnages qui ne sont jamais que des hommes. Dit comme ça, ça ne m’inspirerait pas, j’avoue. Pourtant McEwan réussit à aborder ces sujets-là sans tomber dans la caricature ni dans le discours lisse. Les physiciens - comme son héros grassouillet, volage et en perte de vitesse - en prennent pour leur grade mais les ayatollah de l’écologie aussi. McEwan choisit de ne pas choisir, il dénonce les dérives de tous ces tristes hommes qui nous entourent et qui pérorent sans jamais sembler maîtriser quoi que ce soit. Et surtout tout le bouquin est nimbé d’une ambiance humoristique qui n’hésite pas à s’aventurer sur le carrément burlesque (pisser par -40° c’est toute une aventure, les jalousies et les situations induites par un héros qui en est à son cinquième mariage…) Son héros est un modèle de personnage détestable et attachant à la fois, dans cette veine de la fiction qui nous fait adhérer à des voyages qui ne payent pas de mine vus de loin mais qu’on a bien du mal à lâcher après les avoir démarrés. Excellent bouquin, distrayant et léger sur des thèmes pourtant pas légers du tout.
Extrait : "Une invitation pour le pôle Nord arriva – du moins la décrivit-il ainsi aux autres et à lui-même. En réalité sa destination se trouvait bien en-dessous du 80e parallèle et, promettait la brochure, il séjournerait à bord d’un « confortable vaisseau bien chauffé, aux couloirs lambrissés, aux moquettes profondes et à l’éclairage tamisé », un navire trônant placidement au milieu des glaces d’un fjord reculé, accessible au terme d’un long trajet en motoneige au nord de Longyearbyen sur l’île du Spitzberg. Les trois difficultés seraient la taille de sa cabine, l’accès limité à sa messagerie électronique et une carte des vins réduite à un « vin de pays » nord-africain."
Ian McEwan - Solaire, Gallimard, 400 pages, 21€50
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