"Berlin Alexanderplatz" est souvent considéré comme l'une des œuvres majeures de la littérature mondiale du début du vingtième siècle. Ecrit en 1928 par Alfred Döblin et publié l'année suivante, ce bouquin est une plongée dans le Berlin de l'entre deux guerres, violent et instable, terreau des horreurs totalitaires à venir, un décor populaire et des quartiers modestes qui n'est pas sans évoquer le mythique "Voyage au bout de la nuit" de Céline.
L'idée de base du bouquin est d'une affligeante banalité et peut se résumer, en gros, au postulat suivant : "Franz Biberkopf est libéré de prison où il vient de purger une peine de prison pour le meurtre de sa femme. Dehors, il se promet de devenir honnête".
J'avais déjà essayé de lire ce roman il y a une quinzaine d'années. Mais j'avais lâché l'affaire à la page 100 (sur plus de six cents), dépassé par des longueurs terribles, si terribles qu'il faudrait inventer un mot avec dix occurrences de la lettre R à "terrible". Le propos ne décollait pas, j'avais trouvé ce rythme syncopé pour le moins pénible et assommant à suivre. L'histoire piétinait et mon enthousiasme baissait à vitesse grand V. Mais comme beaucoup, je n'aime pas rester sur un échec ; surtout face à un livre qui s'attire des éloges un peu partout où il est lu.
Alors j'ai souhaité profiter de la réédition en poche trouvée d'occasion avec la nouvelle traduction d'Olivier Le Lay qui date de 2009 pour redonner une chance à ce livre totémique pour nombre de lecteurs.
Mais je dois admettre avec un peu de tristesse que pour la deuxième fois, Alfred Döblin m'a vaincu.
Cette fois je suis pourtant allé plus loin. Aux alentours de la page 200, soit le tiers du livre. Mais j'ai senti bien avant qu'une nouvelle fois je n'arriverai pas au bout. L'endurance m'a fait défaut et je n'ai pas trouvé les clés pour déchiffrer ce roman.
Il y a pourtant une richesse inouïe dans le style de Döblin qui alterne les points de vue narratifs et - on le devine grâce à la traduction - qui utilise une langue riche, diversifiée et colorée. L'argot qui rappelle forcément certains passages d'un Céline (qui écrira "le Voyage" trois ans plus tard) y côtoie un style plus soutenu et alambiqué.
Le gros point fort de l'auteur concerne sa capacité à développer des descriptions de lieux sordides, du quotidien des petites gens, et pour nous raconter les destins de ces personnages en prise avec un destin contrarié. On ne peut pas passer ces qualités sous silence, il s'agit là d'un exercice de haut vol qu'on ne peut qu'admirer. Le réalisme de Döblin est d'une puissance évocatrice qui n'a rien à envier aux auteurs français les plus acclamés de l'époque moderne. Mais cela n'a pas été suffisant pour moi, je me suis ennuyé, vaincu par le rythme anarchique du récit, par sa teneur éclatée et peu ramassée (là ce n'est pas du Céline) et par ses longueurs, encore. La petite musique ne m'a pas parlé, et ce ne fut qu'à de très rares moments que je me suis évadé, avec cette délicieuse sensation de quitter le réel pour rejoindre l'univers que l'auteur dépeint. Ce que je recherche avant tout dans une lecture de fiction. Bref, encore un échec pour moi sur ce "Berlin Alexanderplatz" et je crois bien que cette fois c'était le dernier.
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