Avant toute chose, il me semble important de préciser que je ne me considère absolument pas un bon critique. J'aime ou je n'aime pas une oeuvre, qu'elle soit littéraire ou artistique sans ressentir le besoin d'en faire des tonnes et de plonger dans l'analyse à outrance. Je fais partie de ceux qui ressentent les choses et qui, parfois, les vivent sans chercher à tout expliquer.
Ceci étant dit, je dois avouer que la production d'Ernest Hemingway m'intrigue. Difficile d'envisager de causer de cet auteur mythique élevé au rang de génie par certains enthousiastes dithyrambiques sans se retrouver plombé par les discours cent fois rabattus et les lieux communs.
Ceci étant dit, je dois avouer que la production d'Ernest Hemingway m'intrigue. Difficile d'envisager de causer de cet auteur mythique élevé au rang de génie par certains enthousiastes dithyrambiques sans se retrouver plombé par les discours cent fois rabattus et les lieux communs.
Six romans... C'est relativement peu - même si Ernest a choisi de casser sa pipe à 62 ans seulement. Mais six romans sur lesquels il me semble que l'on a bâti un mythe un peu disproportionné. Alors certes, enfant j'ai adoré lire "Le vieil homme et la mer" qui a constitué l'un des livres fondateurs de mon goût de la lecture. Toutefois j'ai plutôt boudé ses autres romans écrits au sommet de sa gloire, sans que je sois capable d'en fournir une explication rationnelle, souvent vaincu par l'hyper réalisme que je trouvais barbant et attendu. Comme si Hemingway s'efforçait à faire du Hemingway.
Ce n'est finalement que depuis quelques semaines que mon regard sur l'oeuvre d'Hemingway change et en particulier depuis que je me suis lancé dans la lecture décousue mais régulière de l'énorme volume de ses "Nouvelles Complètes" paru chez Gallimard Quarto et que je viens de terminer ce weekend. Car avant d'être cet écrivain de la violence des hommes (l'alcool, la corrida, le safari...) Hemingway fut journaliste et capable d'écrire des textes courts. L'exercice de la nouvelle se prêtait donc à la perfection à un style incisif et percutant, allant même jusqu'à la spontanéité qui fait défaut à ses romans tardifs. Et il faut admettre que la plupart de ses thèmes de prédilection sont déjà présents dans ces 80 nouvelles.
Dans ce recueil de 1200 pages (excusez du peu), l'intégrale des nouvelles permet de souffler le chaud et le froid. Certains textes sont de véritables pépites alors que d'autres restent plus anecdotiques et s'ils n'avaient été signés d'Hemingway, je doute qu'ils auraient eu l'honneur d'une publication. Mais ça fait partie du jeu, comme dirait l'autre.
Enfin, on trouvera également dans ce pavé une sélection de lettres qui apportent un éclairage complémentaire et indispensable à la lecture des nouvelles. Sa correspondance ne fait pas partie, à ma connaissance, des correspondances d'auteurs les plus acclamées par les amateurs du genre, mais il n'empêche, elle reste très intéressante. On y découvre en effet l'envers du décor et notamment son rapport à son oeuvre, ses doutes mais surtout ses certitudes. Hemingway y démontre en effet une certaine assurance, plutôt fier et convaincu de la qualité de sa production lorsqu'il écrit à son éditeur. Plus mesuré quand il correspond avec Ezra Pound ou d'autres auteurs de la même époque, il se remet à compter avec frénésie le nombre de mots de chacune de ses nouvelles qu'il souhaite publier lorsqu'il s'adresse à nouveau à son éditeur. On y lit l'obsession de l'auteur pour le nombre de mots de ses textes, et pour ses thèmes de prédilection, la pêche, la tauromachie mais on y trouve aussi des témoignages quasi historiques quand il raconte la guerre en Europe.
Au final, ce recueil qui alterne le très bon et le moyen reste un bouquin hautement recommandable pour tout amateur de littérature américaine et très instructif pour tout amateur de littérature tout court. Ne serait-ce que pour ces lettres qui apportent un éclairage nouveau sur un nom mythique.
Merci pour cette "critique" littéraire, bien instructive !
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